A mi-chemin entre l'homme et le cafard, Lou est un personnage aussi fascinant que répugnant. On se surprend pourtant à suivre ce petit être obscur et vicieux jusqu'au bout et avec une curiosité malsaine.
Au 21eme siècle, on est tous au courant des magouilles des médias et des manipulations des journalistes, mais le travail des freelances, ces chasseurs de primes modernes, reste, lui, encore mystérieux et soulève beaucoup de questions d'ordres multiples: professionnel, technique, budgétaire, éthique...et bien sûr moral.
Lou est un oiseau de nuit qui s'agite dans l'ombre, au figuré comme au sens propre, et la ville est son terrain de chasse. A bord de sa voiture, glissant à toute allure sous les lampadaires à la manière de Ryan Gosling dans Drive, les scènes nocturnes défilent, constellées par l'éclairage urbain tentaculaire d'Hollywood, dans un ballet, une course effrénée, sublimée par un jeu de caméra extrêmement habile.
La frénésie de certaines scènes est très bien (re)transmise par l'utilisation de plans multiples alors que, paradoxalement, la tension d'autres scènes est au contraire décuplée par l'absence d'images qu'on ressent avec beaucoup de frustration comme une privation. Là où le film est dérangeant, c'est qu'il arrive à nous donner envie de réclamer de droit ces images pourtant volées ! Nous refusons qu'on nous dissimule des informations quelles qu'elles soient ! Mais comme les autres spectateurs, nous devons ronger notre frein pour découvrir l'ensemble des images en même temps que le reste de la population sur les écrans des News...
Nous sommes donc amenés par la caméra à adopter une position tantôt de complices ou tantôt de spectateurs. Exactement comme Lou. L'immersion est donc complète.