Première découverte du cinéaste Kim Soo-Yong et j'ai trouvé l'approche comme l'écriture assez modernes avec une excellente gestion de la temporalité et des décors. La narration repose sur beaucoup de séquences qui pourraient venir de flash-backs, de flash-forwards ou de fantasmes. Le personnage féminin est bien traité avec une approche assez frontale de sa sexualité, ses frustrations et ses pulsions. Connaissant le machisme de la société coréenne et la censure très restrictive, le résultat est très audacieux pour son époque et fonctionne encore bien aujourd'hui. Vu la courte durée du film (77 minutes), je me suis douté qu'il y avait eut pas mal de coupes et ce fut bien le cas : le film fut d'ailleurs bloqué 4 ans (tourné en 73, sorti en 77).
En même temps, ce n'est pas uniquement un portrait féminin, désabusé et touchant, puisque le film aborde aussi le capitalisme déjà bien implanté en ville avec ses montagnes de billets circulant dans la banque mais qui ne profite ni à ceux dans le besoin immédiat ni à ceux vivant à la campagne. On sent un réel dégoût envers la gente masculine (la séquence dans le bar où la caméra saute d'une conversation à une autre dans un montage très syncopé) et une terrible solitude qui passe par les lieux que traversent l'héroïne : étrange zoo désert, petites ruelles, place vide, immeuble de banlieue sans personnalité et même un cimetière militaire (on comprendra pourquoi en fin de film).
Ca donne un spleen immédiat grâce à sa comédienne qui dégage une sorte d'érotisme fantomatique assez entêtant. Night journey possède un réel parfum de trouble dans ses moments plus abstraits, comme deux séquences où planent le viol entre souvenirs et fantasme.