La force de Niki tient à sa contrainte intrinsèque, celle qui régit ses conditions de production : interdiction de figurer les œuvres de l’artiste, alors même qu’il s’agit d’un biopic consacré à lui ! En résulte une réflexion menée sur la création, regardée par notre protagoniste comme une nécessité, par son entourage direct comme une curiosité, par les médecins enfin comme autant de symptômes d’un « délire » ou d’une « hyperthyroïdie ». Dès lors, l’achèvement importe peu, et le long métrage s’attache aux mouvements d’un corps au sein d’un cadre aussi serré et figé que la société dans laquelle il se doit d’évoluer : Niki est tiraillée entre son incapacité à insérer l’art dans sa vie quotidienne, contrainte de s’exiler pour créer, et la problématique consistant à « vivre de son art » au sein d’un monde où la consommation de masse se développe. Il s’agit alors de « sortir de son moule », et c’est ce que capte très bien Céline Sallette, composant une forme à la liberté tonale appréciable – mention spéciale à la drôlerie des aveux d’infidélité réciproques – qui s’échappe parfois de sa maîtrise pour expérimenter la vision par kaléidoscope ou le split screen. Une belle réussite portée par l’interprétation magistrale de Charlotte le Bon, qui trouve ici son meilleur rôle.