Le meilleur film de Xavier Dolan !
Après son surprenant triomphe à Cannes où il remporta un prix spécial du Jury mérité, le dernier film du jeune prodige Quebecquois Xavier Dolan se dévoile enfin au public en ce mois d'octobre: Ninja Turtles.
Retrospective et verdict.
UNE NAISSANCE DANS LE DOUTE ET LA DOULEUR
En 2012 déjà, avant même que Dolan ne soit annoncé derrière et devant la camera (on reviendra sur ce point plus tard), l'annonce du film avec Michael Bay à la production avait semé des premieres craintes méritées.
A peine le film annoncé, les "vrais fans" de la licence Tortues Ninja redoutaient déjà le trop plein d'actions et d'explosions ainsi que les mouvements de caméras circulaires nauséeux propre à cet auteur. Mais surtout, les puristes dénoncaient déjà des modifications "blasphméatoires" et "incohérentes" au coeur même de la mythologie complexe de ces 4 tortues et de leur père-rat qui mutent pour devenir de puissants maitres ninja justiciers. Scandale : il était question que les tortues ne soient pas des mutants dans le film mais.... des extraterrestres ! ...C'est dire.
Qu'importe les déclarations rassurantes de la production, de toutes façons pour les fans c'était évident : il était impossible de faire mieux que la précédente trilogie du début des années 90 qu'ils avaient vu à 8 ans. Ce nouveau film serait aussi forcement plus bête et moins bien que leur dessin animé favori où le méchant est un cerveau extraterreste pilotant un robot en slip à bord de son "technodrome" coincé dans la dimension X.
La situation était gravement tendue.
L'ARRIVEE DE XAVIER DOLAN SAUVE LE NAVIRE DU NAUFRAGE
C'est alors, que les producteurs d'Hollywood, toujours pleins d'idées et d'audaces, créent la surprise en confiant les commandes au Jeune Xavier Dolan qui sort tout juste de la production de "Laurence Anyways".
D'après la légende, Bay et Dolan se sont rencontrés à Cannes à la projection de 8 heures du dernier Alain Reisnais "Vous n'avez encore rien vu". Tout deux étaient charmés par le film et ont décidé d'aller en parler ensemble autour d'une bouillabaisse chez "Astoux et Brun", rue felix faure. Un long repas où ils n'ont eu cesse de se découvrir points communs sur points communs, jusqu'a voir naitre les débuts d'une belle amitié. Sans s'en rendre compte, ils avaient passé toute la journée ensemble, et à 3 heures du matin, après une longue promenade sur la plage à parler de leur complexe d'oedipe et de caméra 3D, pour Bay c'est décidé : Dolan est l'homme de la situation pour relancer la licence Tortues Ninja.
Se moquant de l'avis de la doxa festivaliere et des cinéphiles hipsters les plus snob qui le soutiennent depuis "j'ai tué ma mère", Dolan créé la surprise et se montre tout de suite partant. Le lendemain, durant la conférence de presse de Laurence anyways il annonce avoir signé un contrat pour 4 films : une trilogie Tortues Ninja et le spin-off Casey Jones.
En jeune impertinent qu'il est, il déclare ensuite sur twitter
"hate de faire avec @michaelbay un vrai film TMNT et pas le pretexte à vendre des jouets que la série a toujours été. #cowabungatabernacle"
Une de ses nombreuses premières sorties narquoises qui ne manqueront pas de faire rager les fans tout au long d'une production rock n roll qui a duré 2 ans.
Mais aujourd'hui en 2014, qu'en est il réélement du film ?
UNE REUSSITE TOTALE
Dès les premieres secondes, pas de doute c'est du Bay et du Dolan.
On fait face à une oeuvre de cinéma totale, à la fois, fun, pop et décérébrée comme nous les offre chaque été le maitre-faiseur des blockbusters US. Et, dans le même temps, entre deux coups de nunchaku, on flirte avec l'intime, on se love dans le beau, bref on regarde un Xavier Dolan.
ENFIN UNE PLACE POUR LE PERE !
On pouvait en douter, mais pourtant ils sont bien là : la famille, la quête de son identité, la peur de grandir, la mode... tous les thèmes majeurs du cinéma Dolanien se retrouvent dans Ninja Turtles... Mais en mieux, en plus fort, en plus beaux, comme transcendés.
Depuis "j'ai tué ma mère", on le sait, la mère est au coeur de la filmographie du quebecquois. Ninja Turtles lui permet aujourd'hui de nous parler enfin du père. A travers Splinter, le rat-maitre ninja mutant qui fait le choix de sacrifier toute sa vie pour élever, protéger et préparer les 4 Tortues, Dolan nous confie ses craintes sur la paternité et l'adoption.
Lors d'un flashback exceptionnel (si je ne m'abuse, le premier dans sa filmographie) où l'on peut voir le rat-père célibataire élever seul dans les egouts ses 4 tortues, le réalisateur donne ici une vraie leçon de cinéma, tout en pudeur, en legereté et sans misérabilisme voyeur. Qui aurai cru que Dolan verrai dans les Tortues Ninja l'occasion d'un si beau pamphlet sur la famille universelle ? Au delà des préjugés sociaux et des races ? C'est en tout cas très bienvenu alors que la famille moderne est au coeur de polémiques toujours plus malvenues et nauséabondes.
DES TORTUES VIVANTES GRACE A LA PERFORMANCE CAPTURE
A l'annonce du film en 2012, il fut mention de l'usage de la "performance capture" assistée par ordinateur pour donner vie aux nouvelles Tortues plutot que de bêtes costumes. Les forums de geeks qui imaginaient leur casting idéal étaient alors formels : peu d'acteurs étaient capables d'endosser le role de leurs personnages favoris. Le casting de reves des fans etait donc à peu de choses près celui ci :
Leonardo : Andy Serkis
Raphael : Andy Serkis
Michelangelo : Andy Serkis
Donatello : Andy Serkis
Splinter : Andy Serkis
Shredder : Andy Serkis
April Oneil : Zoe Saldana.
Xavier Dolan arrive lui en 2014 et impose sa grande famille du cinéma pour notre plus grand plaisir comme suit :
Leonardo : Xavier Dolan
Raphel : Patrick Huard
Michelangelo : Antoine-Olivier Pilon
Donattelo : Melvil Poupaud
Splinter : Robert Charlebois
Shredder : Garou.
Et surtout n'oublions pas l'extraordinaire performance de Anne Dorval jouant Megan Fox jouant April O'Neal. La muse de dolan certes toujours un peu cabotine mais définitivement délicieuse.
Par ailleurs, en véritable artiste complet, Dolan a choisi de designer lui même les costume en plus de réaliser et jouer. Et pareil, là où les fans voulaient des tortues globalement identiques avec juste leur bandeau de couleur respectif sur les yeux pour être "fidèle" à l'oeuvre original. Dolan en grand amateur de mode ne les a pas ménagé et a réfléchi à ce que serai vraiment la tenue d'une tortue ninja adolescente élevée dans les égouts de new york dans les années 2000. Il leur a donc tous imaginé un style particulier, un mélange d'accessoire de ninja, mais aussi de bouts de fringues d'ado gangsta récupérés dans les poubelles, des vieilles baskets, des lunettes de soleils,ou encore des badges, en ayant aussi pensé à grapher leur carapaces de tags et autres caracteres japonnais. Des détails certes faciles mais amusants et bienvenues pour caractériser un peu les archétypes que sont nos 4 tortues.
DES DEFAUTS MAIS UN VRAI ET PUR DIVERTISSEMENT
Alors oui, certains trouveront de quoi pinailler, si la "personalité"' des tortues est bien respectée, leur bromance comme on l'aime tant est à peine esquissé dans ce premier opus. Tout comme l'intrigue qui demeurre légère, tandis que New York et l'art du Ninjutsu sont ici tristement secondaire pour un film de ninja a New york... Rappelons nous néanmoins qu'il s'agit avant tout d'une oeuvre facile d'accès pour enfant occidental écervelé et qu'il serai completement inapproprié de lui demander autre chose.