Pizza, coca et frites... Avec un tel régime alimentaire, il peut paraître surprenant et pas très réaliste que des tortues, même si elles sont ninjas, soient bâties comme des armoires normandes sans un pet de graisse, et puissent continuer à faire leurs cabrioles sur les toits de la ville. Alors que pour tout humain normalement constitué, ce menu conduirait inévitablement à la saturation des artères et à l'infarctus fatal.
Tout ça pour dire que Ninja Turtles 2 restera à coup sûr sur l'estomac des palais cinéphiles les plus fins et les plus distingués. En grande partie à cause de l'humour bien gras niveau école primaire, de certaines situations bien lourdes et d'un personnage de Michaelangelo souvent carrément insupportable de bêtise et d'immaturité. La faute aussi à une première partie qui bouchera sans coup férir les artères, tant elle est bien longue à mettre en place des enjeux pourtant ultra basiques et simplistes. De manière à bien sentir qu'un tel film ne peut à l'évidence durer plus d'une heure et demi.
Le gourmet cinéphile finira de dédaigner le plat débordant et pas très frais qu'on lui met sous le nez en ne manquant pas de remarquer que Michael Bay renie carrément son premier opus. Car en effet, il questionnera l'utilité de cuisiner sans finesse les ingrédients du fan service les plus "exubérants" directement achetés au marché plus très primeur de la série animée, alors que pourtant, il avait initialement tout fait, dans le film précédent, pour s'en démarquer. Allant même jusqu'à inscrire les origines de sa recette de sa soupe de tortues dans un bricolage inutile se voulant plus "réaliste"...
Pourtant, s'il est loin de relever de la grande cuisine, certains se satisferont d'un Ninja Turtles 2 qui concentre tous les ingrédients d'un gros McDo dégoulinant de sauce qui était encore sous vide un quart d'heure avant qu'elle finisse dans votre assiette, et cachant sous le steak haché aux hormones mal cuit quelques oignons frits et une feuille de salade vert fluo pour faire illusion. Car mine de rien, ça cale quand même sur le moment. Le goût a beau ne pas être extra, ça passe et ça rassasie quand même et surtout, cela sera oublié dès qu'on aura passé les portes de la salle de cinéma, juste après le générique de fin qui reprend, fan service à fond les ballons, la chanson de la série fétiche.
Le plaisir des papilles cinéphiles est mince, mais étrangement pas désagréable. Bebop et Rocksteady sont là et, même s'ils sont d'une crétinerie abyssale, sont de plus bien représentés et animés niveau technique. Krang relève quant à lui d'un certain plaisir coupable, même s'il est réduit à une marionnette que l'on ne voit que très rarement à l'écran, tout comme Shredder qui ne fait que passer... Seul le van des Tortues fera tâche, en ce qu'il est ouvertement envisagé comme tiré d'une quelconque gamme de jouets Kenner-36-fonctions-plastoc-à-foison. N'espérez pas plus voir en guise de dessert le technodrome pour le climax : il se construit façon Lego durant tout l'épisode final...
Restent à se mettre sous la dent des tortues plutôt bien animées dans leur cabrioles et leurs bastons, mais dont le design ne satisfera pas plus ceux qui ont hurlé à la mort à l'issue du premier opus. Leurs relations chaotiques basiques ont peine à faire vivre le thème de la famille dysfonctionnelle, bien mieux traité dans, par exemple, le très sous estimé TMNT de Kevin Munroe. La thématique très X-Men movie de l'acceptation de la différence passera, elle, inaperçue, tant elle est simpliste et survolée.
Restent aussi quelques scènes d'action qui font le job, que ce soit à bord du technodrome lors du face à face avec Krang, mais surtout lors de l'épisode brésilien, plutôt réussi, à l'occasion du crash d'un avion puis d'une baston sur un fleuve. Véritable trait de crème chantilly industrielle en aérosol sur une coupe de glace à moitié fondue à peine servie, elles font le job sans faiblir et sont parfois traversées subrepticement de ce qui s'apparente à une idée de chorégraphie ou de mise en scène, lorsqu'elles ne sont pas étranglées par les tics habituels du chef Michael Bay, qui a laissé ses casseroles Platinum Dunes, cette fois-ci, à un illustre inconnu qu'il a élevé au rang de commis.
Tout cela ne fera pas de Ninja Turtles 2, à l'évidence, une explosion de saveurs typique de la grande cuisine, encore moins le mariage d'ingrédients délicats choisis avec soin. Il fera plus figure de fast food au goût éphémère, pas désagréable sur le moment mais assez vain, dont le seul souvenir sera inscrit sur votre t-shirt, en forme de tâche de sauce tomate, celle qui dégoulinait de votre pizza tout à l'heure.
Comme à chaque fois au fast food, quoi...
Behind_the_Mask, qui n'aime pas ce copieur de Casey Jones.