Nobody Knows est basé sur des faits réels. Ca fait peur de dire ça. C'est un peu le genre de films qui te donnent envie de te suicider (et c'est ce qu'on aime). En découvrant le film et en comprenant au bout de quelques scènes ce dont il allait s'agir, j'ai prié pour un happy end. Bon. Tant pis.
La première chose qui frappe, c'est le fait que chaque plan semble travaillé, beau mais toujours naturel. Le film est un peu long c'est vrai, mais l'histoire s'étend sur toute une année durant laquelle les enfants tuent le temps comme ils peuvent dans leur petit appartement d'où ils ne sortent jamais.
Non, ce qui choque en premier, ce sont les deux grandes valises, louches. Et le comportement de la mère qui délivre enfin ses enfants, comme si c'était un jeu, en leur disant "Vous avez été courageux, vous avez dû avoir chaud." Tu m'étonnes, dans une valise dans un camion de déménagement en plein cagnard pendant des heures quand on a 4 ans et demi, c'est pas super marrant. Pourtant, ils rient, ils s'amusent, avec une triste insouciance. Seuls les deux plus grands, Kyoko et Akira, ont conscience de l'absurdité de la situation, et essayent de raisonner leur mère. "Maman, je voudrais aller à l'école". "L'école ? Mais non voyons, tu sais bien qu'on se moquera de toi parce que tu n'as pas de père."
En tant que spectateur, on n'a aucun remord à considérer cette fameuse Keiko comme la pire des mères, elle qui prend un autre nom dans son "autre vie" et qui ne se soucie même pas de savoir si ses enfants ont assez d'argent pour manger. Mais les enfants eux-mêmes sont encore très attachés à elle, surtout Kyoko qui va refuser qu'on vende la garde-robe de sa mère, même si c'est pour manger...
L'optimisme fou du petit dernier, Shigeru, qui continue à jouer avec les enfants du quartier, même le ventre vide, parait presque surréaliste lorsqu'il explique ce qui est arrivé à sa soeur, sans paniquer pour autant, et qu'il dit alors adieu, sur ce balcon où il fait pousser la vie, à cette valise-cercueil et à Yuki qui s'en va rejoindre le ciel à sa façon.
Les enfants jouent vraiment très bien, on a finalement peu de dialogues, Kore-eda semblant privilégier les regards, souvent plus efficaces que les mots au cinéma, et en particulier dans le cinéma japonais. Le film n'est pas sans similitude avec Le Tombeau des Lucioles, de Takahata, mais on ne peut pas lui en vouloir puisque Nobody Knows est assurément un très bon film.