C'est le grand débat qui anime quelques utilisateurs de réseaux sociaux depuis le 4 janvier : Nocturnal Animals est-il un brillant film ou un gros navet esthétiquement au poil tout le temps ? Tom Ford, cinéaste en herbe depuis son Single Man en 2009 qui lui aussi avait déjà fortement divisé les cinéphiles férus, est-il un esthète clinquant et vide ou un génie subversif ?


Cela va sans dire que les deux réponses à cette dernière question sont possibles: oui, bien évidemment que le film est d'une vacuité immense car ce vide est l'essence même de tout le cynisme de son dispositif filmique. Rien de plus simple: l'envie première du film est de craqueler le vernis de l'industrie de la mode, qui n'est que de l'apparence et de l'acting, par le biais d'une lecture d'un livre révélatrice, elle, de sentiments vrais car s'inscrivant dans une réalité plus crue et horrible. Ce livre serait donc une prise de conscience pour Amy Adams du carcan artificiel dans lequel elle s'est fourrée. Cependant, il réside un énorme problème dans Nocturnal Animals: c'est qu'il est tout le temps lourd. Ford veut montrer à tout prix, tout le temps, qu'il est ironique. Il pointe du doigt la moitié de ses symboliques par le biais de tous les artifices possibles et guide sans cesse la lecture du spectateur afin qu'il comprenne en permanence où il veut en venir. Cela broie tout sentiment de confiance entre l'auteur et son spectateur, donnant la sensation harassante que Nocturnal Animals est d'une prétention absolue.


Pour parler de Nocturnal Animals, il serait inconcevable de ne pas traiter le système à double lecture présent sur les deux heures de métrage, comme annoncé plus haut. Là encore, l'intention aurait été louable si Ford avait un tant soit peu contre-carré son système filmique ironique au fil du récit, et non une stagnation émotionnelle progressivement non-sensique. En s'enfonçant dans le catharsis de Amy Adams (à noter le superbe tableau "REVENGE" et l'ours tué par des fléchettes exposés dans une exposition à l'esthétique clinique, au cas où c'était pas encore clair que c'est ironique), il n'arrive pas à se détacher de tout le système artificiel qu'il avait mis en place afin d'y laisser paraître un semblant d'émotion, qui aurait eu tout son sens en fin de film. Le montage à la truelle du métrage n'aide pas non plus, surappuyant tout ce qui passe sans arriver à offrir un tant soit peu de grand mélange entre toutes les storylines, pouvant devenir alors vecteur de confusion et d'abstraction. Vous aurez donc compris la plus grande erreur du film: il en fait soit trop, soit pas assez, et souvent pas aux bons moments.


Toutefois, il faudrait tout de même parler du message final adressé par le film en fin de métrage, une fois le lien - il en fallait bien un à un moment, sinon ça n'aurait eu aucun sens - entre le réel (Amy Adams qui lit le livre de son ex-mari) et la fiction (l'arc de Jake Gyllenhaal en proie à un "rape-and-revenge" classique et horripilant tellement il est d'une connerie infinie). Le message moralisateur laissé par Ford est d'un réac et d'un misérabilisme incroyable. Il concentre tout ce que le cinéma devrait désormais jeter à la poubelle pour le restant de ses jours. Ce message aurait pu être tout aussi cynique que le reste du film, mais, comble de la chose: RIEN ne semble l'indiquer. Il semble totalement censé, compris et inclus dans le récit comme une vérité intangible et aucunement sarcastique car il est amené par le personnage réel de Gyllenhaal - ici l'ex-mari de Amy Adams, suivez bordel ! - qui lui est dépourvu de cynisme et de second degré, privilégiant l'émotion pure à la simple remarque cinglante.


Du côté des acteurs, pas grand-chose à dire: Amy Adams est très jolie et est parfaite dans le rôle de la femme qui en fait volontairement trop (PARCE QUE C'EST IRONIQUE, EMOJI CLIN D'OEIL); Jake Gyllenhaal en fait volontairement trop aussi mais parfois pour des raisons inconnues (mais ça doit être IRONIQUE); Aaron Taylor-Johnson et Karl Glusman ne sont pas mauvais, mais semblent tourner très vite à vide tellement leurs storylines tendent rapidement vers le rien (IROnique ?). Cependant, mention spéciale à Michael Shannon, personnage archétypé et surécrit aux moments essentiels, qui arrive à capter et tétaniser par le regard l'attention du spectateur. Il a un background (exploi... expédié plutôt) pas inintéressant qui offre la seule vraie ambiguïté au film, au milieu d'un didactisme digne de télé-réalité.


Si le but de la filmographie de Tom Ford est de pousser le sur-symbolisme de son second degré jusqu'à en finir détestable, il n'en est pas loin avec cet horrible Nocturnal Animals, qui ne serait donc... Qu'un gros navet esthétiquement au poil tout le temps. Déjà le flop de l'année ?

WuTzng
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le 17 janv. 2017

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WuTzng

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