La bande-annonce laissait entrevoir un sous-Gone Girl, mais la précédente réalisation du styliste américain Tom Ford avait reçu un accueil assez chaleureux. La curiosité était donc de mise. Toutefois, le doute sur la qualité de Nocturnal Animals n'aura pas plané très longtemps puisque le film s'affirme dès les premières minutes comme un croisement risible entre The Neon Demon et un roman de gare lambda.


L'intrigue démarre le jour où Susan, une femme riche propriétaire d'une galerie d'art, reçoit le manuscrit du nouveau thriller écrit par son ex-mari. Dans une courte lettre, il lui explique avoir essayé de suivre ses conseils en inventant une histoire beaucoup plus sombre et personnelle. Susan commence à lire le roman, qui va évidemment l'émouvoir et lui rappeler son ancienne relation ainsi que sa rupture.


Nocturnal Animals est donc construit sur un va-et-vient entre l'histoire du livre, qui met en scène ses propres protagonistes, et la lectrice. Cependant, les scènes avec Susan ne font que suivre le cours de son quotidien. Tout ce qui relève du thriller fait partie du roman, ce qui déjà pose un problème : pourquoi le spectateur devrait-il se soucier d'événements et de personnages présentés comme fictifs ? N'importe quel bon réalisateur aurait écarté cette question en proposant une mise en scène efficace et prenante. Tom Ford, lui, ne parvient pas à rendre intéressante cette histoire de famille agressée par des automobilistes Texans, qui est de toute façon cliché au possible. Le seul effort du styliste réside dans l'utilisation d'astuces de montage dénuées de toute réflexion pour tracer un parallèle entre le roman et la vie de Susan. Le résultat est grossier et rend le lien entre fiction et réalité beaucoup trop artificiel pour être envisagé comme un élément scénaristique pertinent. On est loin des points de vue complémentaires de Gone Girl.


La présence d'un roman dans l'intrigue ne semble finalement pas avoir d'autre fonction que celle d'excuse pour déballer tous les stéréotypes et raccourcis possibles. C'est à mon sens particulièrement visible lorsqu'on se penche sur le propos du long-métrage.
À un moment donné, on comprend que la rupture entre Susan et l'écrivain est une conséquence de l’incompatibilité entre le monde des riches et le monde des pauvres. Par pur manichéisme (à moins que ce soit parce qu'il n'y a pas de pauvre dans l'histoire), la faute est attribuée aux riches, qui dans le film forment une sorte d'élite culturelle évoluant dans un univers déconnecté de la réalité régi par les apparences (mais attention, la laideur a sa place). Ce postulat dénué de toute subtilité emprunte au fil du film une tonalité de plus en plus ridicule. Il est évident que le styliste se complait dans le monde aseptisé des riches, et ses vagues tentatives de le critiquer restent stériles : les scènes où les bourgeois sont montrés en train de vénérer un art creux et décadent finissent par prendre des accents pathétiques, puisque Tom Ford ne parvient même pas à se rendre compte qu'il participe lui aussi à la mort de l'art en érigeant le faux en vrai et le laid en beau.


A l'arrivée, Nocturnal Animals se résume à un enchaînement écœurant de bêtises et de phrases toutes faites qui ne prend jamais de recul sur ce qu'il est ni sur ce qu'il raconte. En même temps, quel niveau de réflexion pouvait-on attendre d'un merdeux qui confond cinéma et défilé de mode ?

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le 23 janv. 2017

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