Dans la lignée du magnifique "The Rider", Chloe Zhao filme de nouveau le midwest américain, ses paysages désertiques magnifiques, sa nature sauvage et, au milieu de tout ça; un protagoniste taiseux, sympathique, travailleur, en proie au doute et aux fantômes de son passé, et à travers lui, toute une communauté qui peuple ces terres hostiles. Frances McDormand met tout son talent au service de ce rôle, et il est immense.
Zhao filme la dignité. Ce film plein de paradoxes montre cette femme fière, qui valorise son indépendance et ne veut dépendre de personne, tout en illustrant la précarité de cette situation, qui n'est supportable que grâce à la solidarité de tous ceux qui ont choisi ce mode de vie.
Elle filme aussi le trauma et la perte, représenté par la sauvagerie de la nature, nature qui, nouveau paradoxe, est profondément humaine, puisqu'elle représente aussi bien le paradis perdu de la protagoniste avec son mari que le paradis à venir de son amie Zwankie.
Le film est très riche et présente aussi une philosophie du temps, circulaire, où aucun adieu n'est définitif. Il illustre ce faisant ce qu'est ici le nomadisme : une volonté de casser la progression du temps, de vivre au gré des saisons, de perdre et retrouver ses proches.
Ce film avait tout, donc, pour être le grand film sur une incarnation du rêve américain, cette terre de liberté et de pauvreté extrême. Malheureusement la réalisation est un peu décevante, avec une utilisation souvent pompière de la musique et des plans répétitifs. Mais que ces (petits) défauts ne dissuadent personne d'aller voir ce beau film.