"Normandie-Niemen" est tiré d'une histoire tout-à-fait vraie et assez méconnue. De Gaulle à Londres toujours en quête de reconnaissance auprès des alliés envisage l'envoi d'une unité aérienne de pilotes de chasse auprès des forces soviétiques dès 1942.
Au début, l'escadrille s'appelle Normandie auquel s'ajoutera officiellement le nom de la bataille victorieuse lors de la traversée du fleuve Niémen, par les soviétiques eux-mêmes.
Le film est co-produit par la France et l'Urss et de gros moyens semblent avoir été réunis pour l'occasion.
Si les bases de l'histoire sont véridiques, en revanche, le scénario met en œuvre des personnes imaginaires (les noms des héros sont changés). On va plutôt considérer que les personnages du film comme chargés de symboles pour mieux traduire un contexte (scénario de Charles Spaak et Elsa Triolet).
Par exemple, les premiers pilotes arrivés en URSS, à peu près au moment de la bataille de Stalingrad, rongeaient leur frein dans une base aérienne en Algérie, condamnés à l'immobilisme. Ils se heurtaient à une hiérarchie légaliste et vichyste (un capitaine, notamment). À la première occasion, ces pilotes désertent pour rejoindre Londres avec un appareil de la base … Quelque temps après, une fois que le vent eut tourné à Alger, ne voilà-t-il pas que le capitaine (passé commandant entre temps après avoir abattu, sur les ordres de Vichy, un avion anglais !) débarque dans l'escadrille Normandie-Niemen pour en prendre le commandement. Pour l'avoir vérifié, il n'y a rien d'historique dans ces détails. Mais le débat inévitable qui s'ensuit me parait fort intéressant entre ceux qui se sont jetés dans la bataille en "désertant" (pour la bonne cause !) et ceux qui suivent les ordres officiels de l'Etat, souverain. Bien sûr, on est tenté de crier au scandale mais, rétrospectivement, avouons que les choses ne sont quand même pas si simples. Si, dans une période troublée, on peut applaudir à l'héroïsme de certains (heureusement qu'il y en a qui ont su se lever !), on peut aussi considérer qu'on attend d'un corps militaire national qu'il ne prenne pas partie et reste sous le commandement du pouvoir officiel tant qu'il existe et est reconnu (la grande Muette).
Côté casting, le film ne développe pas côté français de grandes vedettes : Gianni Esposito, Pierre Trabaud et Jean-Claude Michel dans le rôle du capitaine (devenu commandant cité plus haut). Mais tous les acteurs soviétiques ou français sont très impliqués dans leur jeu.
Point important à signaler, c'est que les soviétiques parlent russe, les français leur langue et les nazis, l'allemand. Ceci donne une plus grande crédibilité au film dans les difficultés naturelles rencontrées.
Point émouvant à la fin : la marseillaise chantée en russe par les pilotes soviétiques …
Sorti en 1960, au moment de la Nouvelle Vague alors que la mise en scène de Jean Dreville est très classique, le film semble ne pas avoir rencontré un grand succès en France alors que le film fut plébiscité à l'international et en URSS …
Personnellement, c'est un film que j'ai vu maintenant plusieurs fois et qui mérite largement d'être redécouvert.