Ça me fait forcément un peu mal au cœur de remarquer que cet énorme bras d'honneur fait à la Saint-Valentin, et rediffusé par Arte en cet occasion (le reportage est en fait vieux de plusieurs années) est de loin la meilleure chose qu'il m'ait été donné de voir en ce début d'année 2014. Et pourtant, il faut bien s'y résoudre, Nos fiançailles est une véritable gourmandise d’extrémisme religieux. Bien sûr, le court documentaire est complètement biaisé, comme en témoigne son montage extrêmement elliptique et racoleur qui rappelle les plus belles années de Strip-Tease ; mais ce truchement du point de vue lui permet d'être tout à la fois drôle et horrifiant sans céder aux artifices de ce type d'exercice, à commencer par la voix-off. Le tout consiste surtout en un enchaînement de scènes surréalistes, liées entre elles par une irrémédiable montée en puissance des idéologies d'extrême droite. Le "personnage" de Fleur est le plus représentatif de cette force grandissante : tout d'abord visiblement mal dans sa peau, fiancée peu convaincue de Thibaud, écrasée par la pression familiale, terreau parfait du Renouveau Français (elle parle de la nécessité d'un "despotisme éclairé" pour la France et ne trouve pas normal qu'on "laisse croire aux homosexuels qu'ils sont normaux"), elle finit par pénétrer les rangs serrés du GUD, le tout sous le giron inquiétant de Saint-Nicolas-du-Chardonnet, où se prononcent des messes à la gloire de dictateurs éteints. Et là où le documentaire oublie de proprement fournir matière à analyse sur cette évolution lente des extrémismes, pointant sans toujours désigner, nommant sans forcément définir, il offre néanmoins un spectacle de déchirement idéologique à ce point grotesque et révélateur qu'il en devient à sa façon indispensable.