Un assassinat peut en cacher un autre ... Dans la nuit du 5 au 6 décembre 1986, Malik Oussekine est battu à mort par les forces de l'Ordre. La même nuit, à Pantin, Abdel Benyahia est abattu par un policier ivre. Deux affaires qui n'ont rien à voir mais qui se situent au moment des grandes manifestations contre le projet de loi Devaquet. Montrer pourquoi l'un de ces meurtres provoque un scandale national alors que l'autre n'est révélé que tardivement, pour éviter un fâcheux amalgame pour le ministère de l'intérieur est l'idée de départ de Nos frangins et, ne serait-ce que le devoir de mémoire mérite de la saluer. Le réalisateur, Rachid Bouchareb, tient d'abord à contextualiser le film, avec force images d'archives (qui ne sont vraiment pas à l'avantage du gouvernement de l'époque, et pour cause), tout en s'attachant à la douleur et à l'incompréhension des familles meurtries. Certains pourront reprocher au film de ne pas avoir de réel point de vue mais celui-ci existe pourtant, sous-jacent et pleinement exprimé par les dernières images et la chanson de Renaud qui a donné son titre au long-métrage. Certes, cette sorte d’œuvre chorale semble parfois avoir du mal à trouver son unité (le personnage du membre de l'IGS, interprété par Raphaël Personnaz, n'a pas suffisamment de temps pour exister vraiment) mais la force du jeu de Reda Kateb, Samir Guesmi et Lyna Khoudri est suffisante pour pallier une mise en scène que l'on pouvait attendre plus vive. Et l'hommage à ces deux martyrs de la violence policière reste un geste nécessaire et salutaire dans une démocratie telle que la notre.