Plus je fréquente les films de Kazunari Takeda, plus j’apprécie le réalisateur et le regard tendre qu’il pose sur des gens « normaux » emplis de leurs certitudes et de leurs contradictions. Cette douce et à peine amère comédie remplit tous les critères du Roman Porno (les 3 questions et les scènes « chaudes »), permet aux différents acteurs et actrices de donner libre-cours à leur talent et nous offre quelques scènes grandioses dont le dernier repas. Si le scénario d’Itsumichi Isomura reste assez faible surtout dans son épilogue final, les dialogues sont savoureux, la qualité technique (image, montage, le cadrage des personnages…) renforce l’empathie qui se dégage de l’ensemble. Les thèmes pourraient être lourds : la crise du couple, les délicates relations père-fille, l’infidélité, la rigidité des anciens versus la libération (sexuelle) des jeunes. Mais, la maladresse du père (Shinobu Tsuruta) et surtout l’arrivée de ce couple imprévu et improbable (Toshiyuki Kitami et Jun Izumi) à la sexualité libérée fait exploser le huis-clos. L’intelligence de Takeda est de faire de chaque repas les points d’orgue du film. A chaque nouveau convive, on monte d’un cran dans l’humour et la fraîcheur. Il est vrai que le réalisateur a pu s’appuyer sur une palette d’acteurs masculins et féminins qui donne à leur personnage une grande humanité pleine de force et de faiblesse, d’épanouissements et de contradictions.
Les amateurs apprécieront Mai Inoue, la fifille à son papa, libre, menteuse et aimante, Aoi Nakajima, en maman qui ne demande qu’à être aimée, Jun Izumi, invitée surprise aux écouteurs vissés sur les oreilles et libre comme l’air, ainsi que Makoto Yoshino étudiante et fille à « papa » aussi. Mais, les hommes sont pour une fois tout aussi présents et loin des clichés habituels.
A partir d’un conflit de générations, d’une opposition ville-campagne et de relations familiales « toxiques » tant père-fille(s) que mère-(presque)fils, Kazunari Takeda nous livre une comédie intéressante et chaleureuse.