Ça pourrait être la suite de La 317e section. Et ça l’est en un sens puisque les deux films se suivent. On a quitté la boue de la jungle laotienne pour la noirceur d’une ville fantomatique, difficilement identifiable, qu’on longera de salle de boxe en appartements miteux. Bruno Cremer campe un capitaine destitué de sa mission algérienne après avoir pris part au putsch de 1961, puis libéré, qui pourrait être un cousin de l’adjudant Willsdorf – qu’il incarnait dans le film précédent – moins bavard mais tout aussi intrépide. Et plus suicidaire encore. Après avoir vainement cherché du boulot, il est contacté par une mystérieuse jeune femme et un autre ancien militaire qui fut responsable de sa condamnation, afin de préparer le braquage d’un avion postal. Sans doute un peu rêche pour prétendre égaler les deux réussites du cinéaste que sont La 317e section et Le crabe-tambour mais c’est un beau film, dans lequel on retrouve très largement le style du réalisateur, minutieux et minimaliste dans ses actions et documenté au moyen de vidéos d’archives de la guerre d’Indochine (extraites de ses propres reportages) retransmises lors de nombreuses séquences télévisées puisque le film se déroule majoritairement en intérieur. Et lorsqu’il s’extraie de ses cadres et plonge dans un Lacanau Océan mortifère dans un final bien sombre et désabusé, c’est carrément du Melville.