La belle et les bêtes
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Comme toujours Bong Joon-ho touche à tout, avec un film qui oscille entre l'humour, le conte, la course poursuite et le sordide. Jamais nous ne sommes certains de la suite du scénario qui semble évoluer de surprises en surprises, de délires en délires avec une caméra toujours virtuose.
Mais ce film, résolument, est moins sombre que les autres. Peut-être est-ce l'effet Netflix ? Tout commence comme un conte de fée, tout asiatique, avec des cochons géants, comme Mon Voisin Totoro, auquel on fait des papouilles dans une nature montagneuse et luxuriante. Cette partie en Corée est assez sympathique à regarder. Puis tout bascule. Okja, cochonne OGM géante, va être envoyée à New-York pour un concours de beauté, avant d'être débitée en morceau de viandes. S'ensuit alors une course poursuite dans les rues de Séoul puis dans les rues de New-York, spectaculaire, loufoque, drolatique, avec comme poursuivants une association de défense des droits des animaux (dont le chef, Paul Dano, est proche du psychopathe), la police, la fille qui a élevé Okja et l'entreprise qui possède les cochons OGM.
Bong Joon-Ho s'entoure dans un casting cinq étoiles, retrouvant certains de ses acteurs coréens du moment comme Ahn Seo-Hyun ou encore américains comme Jack Gyllenhaal qui incarne un animateur aussi taré que déjanté, ou Tilda Swinton, chef d'entreprise idéaliste, niaise et machiavélique à la fois.
Le film, moins sérieux, moins tiroir que les autres nous délivre au final un message simple, qui rendrait presque végétarien où Okja, tendre cochon est plus humaine que la plupart des hommes. Il grossit le trait avec une scène de viol par un autre cochon OGM maltraité, moment assez dur à regarder, se faire torturer par un animateur de télé complément fou , histoire de pousser l'horreur à son paroxysme dans un décor industriel glauque et sanguinaire, avec cette cruauté toute asiatique, sans ambages, sans censure. Le film dans sa seconde partie est un plaidoyer contre les abattoirs et l'industrie agro-alimentaire et le capitalisme. Ce qui pourrait être grossier et lourd de moralisme devient heureusement avec le réalisateur coréen savoureux et subtil. Reste que le fond l'est un peu moins. Les hommes, sauf exceptions, sont des porcs. Les rôles en somme sont inversés.
Ce binarisme a ses limites : nature contre ville, biologie contre industrie ; là où habituellement les messages du réalisateur coréen sont plus ambivalent - Parasite dévoilent les faces claires et sombres des pauvres comme des riches, ici il est sans ambiguïté. Le mal est identifié. Cela conviendra peut-être au public de Netflix où nombreux sont les films manichéens et binaires mais c'est un peu décevant pour un réalisateur de cette trempe. Dénoncer l'horreur des abattoirs est tellement évident qu'on s'attendrait à ce qu'il aille un peu plus loin. Mais non, il s'amuse avec un film volontairement régressif et jouissif.
Okja est davantage un conte qu'une fable politique comme le sera Parasite, loin de la noirceur de Memory of Murder, plus dans la veine fantastique de The Host. Ici, l'histoire se finit bien, câlins et léchouilles porcines. Copains comme cochons.
Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste 2020, et pleins de films
Créée
le 15 avr. 2020
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5 j'aime
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