Attention il y-a des films qui nécessitent de sérieuses mises en garde pour les futurs spectateurs et Death Warrior A.K.A. Ölüm Savasçisi ou Zombi 27: Hopping Mad 3 en fait assurément partie. Abandonnez d'emblée toute logique et espérances cognitives, prévoyez après séance un Doliprane 1000, un espace de décompression type chambre noire, un litre de sérum physiologique pour vous rincer les yeux, un spray auriculaire voir un karcher pour vous décaper les oreilles jusqu'au cerveau, deux tubes de pommade pour vous décontracter les muscles soumis à rude épreuve par des spasmes nerveux, de la ouate hémostatique en cas de saignement de nez, un orthophoniste pour comprendre vos gémissements de douleurs plaintifs dès la séance terminée et quelques jours de repos bien mérités avant de retrouver l'usage de vos cinq sens. Avec tout ça vous serez presque prêts à vous frottez à cet improbable film de ninjas … turcs. Car même pour les amateurs les plus endurcis de nanars stratosphériques, regarder Ölüm Savasçisi est une sacrée épreuve.
Ölüm Savasçisi nous raconte l'histoire d'une bande de vilains ninjas qui s'apprêtent à conquérir le monde en passant par les USA. Du coup les autorités américaines n'ont pas d'autre choix que de contacter le plus impitoyable des super héros lorsque Superman est en vacances, à savoir le lieutenant Murat un flic turc impassible et karateka qui a déjà sauver par le passé l’Allemagne de la menace terroriste ninja.
En tête d'affiche de Ölüm Savasçisi on retrouve le réalisateur Çetin Inanç et le comédien Cuneyt Arkin (le Alain Delon du Bosphore), une association de criminels déjà responsable de quelques nanars cultes comme Turkish Rambo, Turkish Star Wars ou Turkish Jaws ; un duo auquel il faut ajouter le monteur fou Necdet Tok capable de vous rendre épileptique et désorienté en moins de cinq minutes. Dans ce film parfois totalement incompréhensible le trio se surpasse carrément pour nous offrir un moment d'extase dadaïste à vous faire totalement vriller le cerveau. Le montage est tellement bordélique, haché, elliptique qu'on a parfois la sensation qu'en plus d'avoir mélanger les bobines il manque des pans entiers de l'histoire à tel point que parfois je ne savais plus du tout ce qui se passait à l'écran. Quant aux scènes d'action c'est un pur régal de portnawak avec des courts plans répétés plusieurs fois en accéléré qui donne la sensation que le héros est capable de tirer dix flèches à l'arc en moins de cinq secondes, des combats rythmés par des sauts de cabris en trampoline, des ninjas qui font des bruits bizarres entre le feulement de chat et le bruit de la poule et des séquences de cascades absolument anthologique. Il faut en effet savoir qu'une course poursuite dans Ölüm Savasçisi est un savant mélange sur un tempo hystérique de stock shots dégueulasses, de courts plans rapprochés du héros au volant, de plans de bagnoles en marche arrière (je crois juste que les plans sont diffusés à l'envers) et de collision de voiture miniature sur fond de décor en carton dessiné à la main. Le tout bien sûr avec une assourdissante batterie de bruitages abrutissants et un montage plus cut que du Michael Bay sous amphétamine qui donne l'impression subliminale d'une vraie scène d'action (Petits veinards vous aurez le même type de séquences pour une attaque d'avion et une cascade à moto). Il faut dire aussi que les bruitages jouent un rôle très important dans cet univers bien foutraque notamment lors des combats durant lesquels les bruits de coups forcément très amplifiés collent très approximativement avec les images.
Cerise sur la gâteau, le cinéma turque qui ne s'est jamais trop soucier des droits d'auteurs et des propriétés intellectuelle semble ici s'inspirer également du cinéma d'horreur et de Evil Dead en particulier avec ninja zombie en papier crépon, plan type steadycam au ras des fougères, vue subjective propre au slasher et une belle attaque de lierre meurtrier. Car les ninjas sont montrés comme des créatures fantastiques et increvables à l'image de cet indestructible chef de gang qui in fine va se transformer en pantin en mousse enflammé après avoir reçu une motte de terre explosive en lévitation dans la tronche (si si c'est possible!). Même moi qui suis pourtant rompu à l'exercice des nanars les plus improbables je me suis surpris à m'extasier d'un "Oh non putain c'est pas possible" devant la transformation complètement folle d'une femme en caméléon vampire miniature que le héros éclate contre un mur. En tout cas cet aspect horrifique nous offre la plus belle galerie de scream queens à moustaches de toute l'histoire du cinéma. Et puis bien sûr il y-a Cuneyt Arkin mâchoire serrée, présence féline, regard charmeur et technique de combat impayable, le mec tombe toutes les gonzesses, éclate tous les méchants, sauve le monde tout en nous sortant deux trois répliques pseudos philosophiques de comptoir sur les ninjas et les samouraïs. Et puis comme d'habitude dans ce type de production si vous tendez l'oreille vous reconnaitrez entre autres des morceaux des bandes originales de Psychose ou New York 1997.
Ölüm Savasçisi c'est du concentré pur jus de nanar, un diamant brut de cinéma Z tellement fou qu'il devrait échapper à toute analyse critique logique … Lâchez prise, mettez votre cerveau sur pause et laissez vous embarquer dans cet improbable grand huit au pays des nanars, ça ne vous rendra pas plus intelligent, vous risquez même de perdre un ou deux neurones, mais mon dieu que ça fait du bien aux zygomatiques.
Ma Note nanar : 09/10