Ombres au paradis par Garcia

Troisième film de Kaurismaki, son style si particulier y est encore en gestation. Ou plutôt tout est déjà là, partagé entre le précédent, Calamari Union et ce film-ci. En effet Shadows in Paradise traite d'une histoire d'amour entre un éboueur et une caissière avec dans les rôles principaux Matti Pellonpaa et Kati Outinen. Difficile de faire plus Kaurismakien, mais il manque pourtant son cynisme et son aplomb habituels, ses personnages inexpressifs et désabusés, qu'il a pour l'instant réservé à son Calamari Union, satire surréaliste en noir et blanc. Comme si ce style ne conviendrai pas une histoire plus réaliste (ou peut-être seulement pour prendre moins de risques en faisant son film de façon plus classique).

En tout cas c'est un film à part dans sa filmographie, une façon originale de traiter ses sujets habituels, des gens pauvres et malmenés par le marché de l'emploi, sauvés par l'amour. Shadows in Paradise est aussi un film sur l'incommunicabilité et la complexité des sentiments amoureux, les personnages sont souvent frustrés, tristes, en colère ou indécis, et le film est clairement désespéré.

Shadows in Paradise est pour moi assez fort et juste, les quelques petites touches du style Kaurismaki déjà présentes apportent en mélancolie sans aller jusqu'à la poésie et la noblesse que l'on trouvera dans ses films suivants. C'est une vision donc beaucoup plus brute de la Finlande qu'il a toujours décrite. Mais il faut bien admettre que c'est aussi un film beaucoup plus maladroit et les buts de l'auteur ne sont malheureusement pas toujours parfaitement atteints.