Tourné pendant la guerre civile qui ravagea le Tadjikistan après la chute du communisme, Kosh ba Kosh raconte l'histoire de Mira, jeune femme qui cherche ses repères après avoir été trahie par son père. Le contexte de la guerre, le délabrement de Duchambé, les réfugiés chassés de leurs campagnes, tout est matière à métaphore pour décrire le marasme psychologique de Mira.

Et puis, il y a le téléférique touristique de la capitale du Tadjikistan, aussi improbable que surréaliste (et qui, aux dernières nouvelles, existe toujours). Véritable double de Mira, aussi fragile qu'elle, lien entre la terre et le ciel, la vie et la mort, entre la ville et le camp des réfugiés, havre de liberté et prison tout à la fois, régulièrement surchargé ou détourné de sa fonction.

Deux images résument tout: Assise dans la cabine, la porte ouverte, Mira regarde ce qui se passe en bas. Elle voit d'abord un corral dans lequel un cheval se démêne, puis un camion à l'abandon dont la plateforme sert de terrain de jeu à des enfants. Comme elle dans sa cabine, le cheval et les enfants sont trop à l'étroit dans la vie.

Le rôle de Mira est tenu par l'actrice chilienne Paulina Gàlvez que le public français a pu découvrir dans L'Auberge espagnole, de Cédric Klapisch, où elle tient le rôle de la professeure de flamenco. A part Daler, l'ami de Mira, le reste de la distribution semble avoir été confié à des acteurs non professionnels. Présenté comme un film en tadjik, une bonne partie des dialogues est toutefois en russe car, dans l'histoire, Mira arrive de Moscou et ne parle pas tadjik. Le détail, qui ne ressort pas vraiment dans les sous-titres, a son importance puisqu'il contribue à l'isolement de l'héroîne.

Malgré un Lion d'argent au festival de Venise 1993, Kosh ba Kosh est un film passablement oublié que l'éditeur suisse Trigon-Film.org a eu raison de sortir de l'ornière. Le réalisateur a commis deux autres opus qui m'ont nettement moins marqué, Le Costume (1999) et Luna Papa (2003). Kosh ba Kosh, lui, est encore dans une certaine tradition soviétique où faire un film n'est pas juste un acte anodin et commercial.

Cela dit, je suis furieux contre cet éditeur qui n'a rien trouvé de mieux à faire que de résumer toute l'intrigue sur la pochette, ne laissant plus aucune surprise au spectateur. Cette manière de faire n'est rien d'autre que du jansénisme pur et dur où il faut enlever tout le plaisir au spectateur (parce qu'à la base, Kosh ba kosh est une comédie ! ) afin qu'il n'oublie pas de réfléchir à sa condition de pécheur :)
StanLefort
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le 31 mai 2012

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