Un ovni que ce film, certainement réservé aux initiés à l'humour nippon... En guise de marrade, on est surtout saisi par un sentiment d'étrangeté. Pas toujours désagréable, il faut en convenir. Cette perplexité provient d'abord du décalage entre les intentions et le traitement. Tout est très sérieux dans cette comédie (après, j'espère que c'était bien une comédie, sinon, l'incident diplomatique me guette... déjà que j'étais pliée au ciné pendant la projection de Tacones Lejanos en Espagne, pendant que les locaux essuyaient une larme, je ne voudrais pas me mettre à dos tout l'Extrême-Orient pendant que j'y suis...). Les personnages, flegmatiques, ne s'énervent jamais, même quand ils se défient et se battent. Du coup, on est loin des assauts verbaux américains, soûlants à l'extrême, alors que la violence scolaire est la même de part et d'autre du Pacifique, on dirait. Le rythme du découpage suit la langueur des conversations : un mot tombe toutes les minutes, au mieux une phrase, et les personnages se figent parfois pendant de très longues secondes, comme s'ils étaient à l'écoute d'une voix intérieure élevée en Suisse. Étonnant et différent, donc bien. Ensuite, il y a le choc culturel, puisqu'il est question ici de rock japonais. A priori, c'est un peu comme l'Armagnac colombien. J'étais plus que dubitative jusqu'à ce qu'arrivent quelques morceaux vraiment dignes d'intérêt en relation avec le premier festival de rock dont il est question à la fin du film. Étonnant et différent, donc bien aussi. Après, il y a les partis pris artistiques : des visages stéréotypés à peine mobiles mais des démarches ultra-réalistes, fluides et vraisemblables. Et des changements de traitement des décors en accord avec l'ambiance de la scène. Les petites aquarelles bien sages du début cèdent le pas à des inventions graphiques plus étonnantes. Bien encore. Reste l'usage du burlesque ou de l'absurde, qui me dépasse toujours un peu. Mais, l'un dans l'autre, une découverte intrigante, dont je ne peux pas vraiment dire qu'elle m'ait plu, mais qui a suscité chez moi de l'intérêt à plusieurs niveaux. C'est bien ce qu'on demande au minimum à un film, non ?