Only God Forgives par Filmosaure
Comme pour dissiper une confusion existant depuis le succès de Drive auprès du grand public, Nicolas Winding Refn revient avec Only God Forgives, un exercice hautement stylistique qui relève plus du film d’art que du cinéma classique.
Silencieux, Ryan Gosling arpente dans une atmosphère angoissante de longs couloirs baignés de rouge. Only God Forgives est un véritable bijou esthétique, à la photographie irréprochable et la mise en scène brillante. Tout le talent du réalisateur et de son directeur de la photographie Larry Smith (Eyes Wide Shut) est concentré dans la représentation infernale qu’ils se font de la Thaïlande, accompagné des accents orchestraux ou d’orgue qui hantent la bande originale signée Cliff Martinez.
Dédié à Jodorowsky et à son cinéma d’avant-garde, le film flirte parfois avec le surréalisme, se perdant dans des échos Lynchiens. La représentation de l’impuissance ou encore celle des relations toxiques entre les protagonistes sont fortes, provocatrices. Le revers de la médaille est cette violence, esthétique certes, mais souvent gratuite, habitant l’ensemble d’Only God Forgives, avec quelques scènes à peine soutenables.
“Le langage du silence est plus intéressant, plus poétique”, affirme Refn. Mais Ryan Gosling reste globalement décevant et ne semble qu’avoir une expression faciale à son répertoire, une difficulté probablement due à son rôle : un personnage faible et frustré, perdu dans l’ombre d’une mère castratrice et d’un frère dominateur. Kristin Scott Thomas, en revanche, est excellente en garce, dont les répliques acides sont la seule garantie de quelques sourires entendus.
Quant au scénario, il ne présente quasiment aucun intérêt, cannibalisé par la démarche artistique d’Only God Forgives. Il n’existe aucun rebondissement qui ne soit prévisible ou annoncé par d’interminables gestes préparatoires. Car le principal défaut du film est son extrême lenteur, laissant le temps d’apprécier ce qui relève du visuel et de l’auditif, et noyant le reste de l’expérience sous un torrent d’ennui.
Trip cauchemardesque et provocateur, peu accessible au grand public, Only God Forgives divise déjà la critique mais a le mérite de se faire remarquer par son non-conformisme.