En quelques films, Nicolas Winding Refn est devenu un membre important de la nouvelle vague de réalisateurs cultes. Depuis la trilogie Pusher jusqu'au dernier Drive, adulé de tous (et qui le propulsa tardivement aux yeux du monde), le réalisateur danois a su proposer un style qui lui est aujourd'hui propre : une mise en scène léchée, une violence graphique extrême, des choix artistiques envolés et des histoires hypnotisantes s'arrêtant presque au niveau du fantastique. Pour son neuvième long-métrage, Only God Forgives, Winding Refn va conserver ses bases pour aller encore plus loin...
Déplacé à Bangkok, le réalisateur nous présente une histoire classique de vengeance à laquelle il a rajouté quelques thèmes qui lui sont chers (la rédemption, l'idée brute de justice, le complexe d'Œdipe...), le tout sous une atmosphère onirique, sombre, pesante. Reprenant donc le style clippesque de Drive, Winding Refn nous balance en pleine gueule son savoir-faire, son talent, sa patte : des plans calmes, des regards stoïques, des cadrages exemplaires, un esthétisme visuel à tout épreuve et une musique enivrante.
Et si vous croyez que vous aurez affaire à un pauvre copié-collé de son précédent film, c'est se tromper lourdement, Only God Forgives étant la parfaite continuité de son style et pas une réitération. Les thèmes proposés sont puissants, énigmatiques, parfois incompréhensibles à travers certaines scènes mais sublimés par une mise en scène aux allures d'uppercut. Avec ses séquences instantanément cultes (le repas au restaurant, l'interrogatoire dans le club, le combat presque final), le film est une compilation de face-à-faces aussi déstabilisants qu'hypnotiques, renvoyant le genre jusqu'à ses derniers retranchements.
Violent voire gore, le long-métrage nous possède comme il possède ses interprètes, que ce soit l'habitué Ryan Gosling (parfait malgré une certaine redondance dans son rôle très similaire à celui du Driver), l'impressionnante Kristin Scott Thomas, ici incroyable, ou encore l'imposant Vithaya Pansringarm, terrifiant en policier se prenant pour Dieu. Rappelant le Dario Argento des beaux jours, Nicolas Winding Refn impose un choc visuel fait de couleurs judicieusement exposées et de plans fantastiques autour de cette histoire bouleversante qui nous happe dans un vortex pour mieux nous broyer. Une nouvelle claque, se rapprochant de plus en plus de la perfection.