Tout comme l'un de mes éclaireurs, Orca est l'un des premiers films à avoir marqué mon enfance. L'image de l'embryon sur le pont du bateau, les cris déchirants de l'orque ou la séquence de la maison qui s'enfonce dans les eaux froides du port, tout cela s'est imprimé de manière indélébile en ma mémoire.
Le film, très bon, n'a pas trop vieilli. Lancé un an ou deux après Les Dents de la Mer pour profiter de l'écume de son succès, le métrage se démarque assez largement de son modèle en insufflant des sentiments humains à son animal titre. Le trauma pivot du film permet d'unir intimement Nolan et sa némésis comme les deux faces d'une même pièce dans ce qu'ils font subir l'un à l'autre ; trauma étrangement similaire pour le pêcheur et l'orque.
Si parfois les actes de vengeance de l'épaulard peuvent apparaître too much, le film installe cependant une vraie tension en le figurant en train de rôder, telle une menace lourde et invisible, aux alentours du port. Cette tension se manifeste aussi via la réaction de vif rejet des habitants du village, accusant Nolan d'avoir abattu le malheur sur eux, mêlant à la réalité la manifestation de superstitions d'un autre âge.
Quant au final, intense et inéluctable, il anime l'orque, dans un jeu du chat et de la souris pervers, de sentiments terriblement humains : la colère et le désir de revanche.