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Fais-en trois tonnes Maurice, y'en aura forcément une qui fera rire l'audience !

Ou lorsque la surenchère vient altérer notre plaisir...

Trois ans après le succès d'OSS 117, Le Caire nid d'espions, une suite s'imposait. OSS 117 : Rio ne répond plus déboule sur nos écrans avec la ferme intention de faire plus fort, d'aller plus loin, et de renouveler la franchise en situant l'action douze ans plus tard. La nouvelle mission d'Hubert Bonisseur de la Bath, dit OSS 117, l'espion français le plus célèbre qui soit *ahem*, consiste à faire équipe avec la ravissante Dolorès, lieutenant-colonel du Mossad, afin de mettre la main sur un dénommé Von Zimmel, un maître chanteur nazi détenant un microfilm prouvant l'implication de hauts dignitaires français quant à leur collaboration avec le régime nazi durant la Seconde guerre mondiale. Une mission à haut risque qui entraînera l'agent le plus maladroit de la planète en Amérique du Sud, des plages dorées de Rio aux verdoyantes forêts amazoniennes.

La presse est unanime, ce second volet de la saga des OSS 117 est supérieur en tout point à son aîné. C'est peut-être faire trop d'honneur à un film dont les défauts sont aussi nombreux qu'ils sont conséquents, mais dont les qualités sont tout autant indéniables et salutaires. À commencer par son esthétique soignée, preuve d'un effort considérable pour nous plonger dans l'ambiance des sixties, avec des références visuelles à foison qui témoignent d'une véritable volonté à jouer avec les codes du cinéma d'époque. Le directeur de la photographie Guillaume Schiffman a dû s'en donner à coeur joie, et son travail s'en ressent. Moins brillant, le rendu visuel du Christ du mont du Corcovado, entièrement reconstitué infographiquement en studio à Arpajon. Le budget, estimé aux alentours de 20 millions d'euros, n'a semble-t-il pas été suffisant pour offrir des effets spéciaux de qualité.

Autre point réussi, assurément le point fort du long métrage, ses dialogues savoureux et irrévérencieux à souhait. Le personnage est plus raciste et misogyne que jamais, souvent à son propre insu. Chinois, juifs et femmes sont rhabillés pour l'hiver et l'on sent un malin plaisir des dialoguistes à jouer sur le politiquement incorrect, avec un humour débridé qui flirte souvent avec le quinzième degré. Mais là où ils font forts, c'est en appuyant le propos politique bien plus que dans le premier volet. Le Général de Gaulle se fait également tailler un veston sur mesure. Cela a pour effet, outre de dénoncer un point obscurci depuis de nombreuses années, de renforcer l'encrage du film à son époque de manière aussi irrésistible que talentueuse.

Mais tout ceci ne serait qu'un château de cartes sans le génie comique de Jean Dujardin, véritable chef d'orchestre avec le don de transformer l'inacceptable en burlesque, avec cette gestuelle décousue, malicieusement proche du pantomime, et son sourcil ravageur en guise d'arme secrète. On sent l'acteur à l'aise avec son personnage, avec un réel plaisir à enchaîner avec une précision chirurgicale les gags désopilants et les bourdes monumentales, sans pour autant tomber dans la répétition des manies convulsives comme ce fut le cas dans le premier opus. Ses mimiques sont toujours autant OSSiennes, mais elles participent à l'impression de déjà-vu à laquelle peu de suites arrivent à échapper. En somme, on retrouve le même Hubert Bonisseur de la Bath, la surprise en moins.

Pourtant, c'est dans la mise en scène de Michel Hazanavicius qu'OSS 117 : Rio ne répond plus trouve ses plus grandes faiblesses. Si l'usage du split screen s'avère perspicace pour entraîner le film dans une fureur pyschédélique, son utilisation à outrance amène à penser que le réalisateur semble très vite à court d'idées pour diversifier la dimension totalement barrée qu'il chercher à insuffler. Une réalisation loin de confiner au génie sans pour autant être déplaisante, qui tend vers une surenchère d'effets alors que certaines bourdes, notamment au niveau du montage, hérissent le poil. Quelques coupes brutales viennent s'immiscer dans le rendu final, tandis que certaines séquences auraient mieux fait d'être écourtées tant elles empêchent le film de trouver une dynamique nécessaire. La séquence du bal par exemple vient plomber le rythme de l'ensemble, et l'on en viendrait presque à regretter de ne pas avoir une zapette à côté de soi pour passer au chapitre suivant. Sisi.

Mais le plus désagréable, c'est de constater très rapidement qu'il n'y a pas que le cinéaste qui se répète : les vannes aussi. Si OSS 117, Le Caire nid d'espions mêlait habilement comique de geste au comique de situation, vannes sexistes et grotesque assumé, OSS 117 : Rio ne répond plus ne se lasse pas de taper toujours au même endroit, avec une alternance presque caricaturale entre blagues racistes et vannes politiques. Il n'y a que ça ! Les autres gags paraissent factices tant ils ne sont que ponctuels, à croire qu'à trop vouloir enfoncer le clou de la dérision raciale, les auteurs ont totalement négligé le fait qu'une bâtisse filmique est constituée d'une multitude de clous à fixer sous peine de la voir s'effondrer. Nous n'en sommes heureusement pas là, mais le mal est pourtant fait.

Répétitivité de la mise en scène, répétitivité de la teneur des vannes, mais également répétitivité du ressort comique employé : si laisser un long silence entre une bourde et une réaction fait son effet au début, la récurrence du procédé finit par agacer, avec cette idée presque saugrenue qu'un interstice est laissé au spectateur pour prendre le temps de rire. Il ne manque que le sous-titre "allez-y, riez" pour définitivement donner au film un cachet un rien prétentieux. Ce n'est évidemment pas le but recherché, mais tout cela témoigne à la longue d'une constance trahissant le manque de diversité sur tout un tas de points qui à la longue nourrissent notre envie de couper court à la loufoquerie.

Dujardin sauvant les meubles, ce n'est pas le cas de ses compagnes de jeu, fades et infiniment insipides. Louise Monot et Reem Kherici font en effet bien pâle figure comparées à Bérénice Bejo et Aure Atika, ces dernières réussissant à renvoyer avec véhémence la balle à leur partenaire quand les deux premières ne sont tout au plus que de simples faire-valoir pour l'ex-Brice de Nice. On en revient aux travers de certains James Bond dont le film veut cette fois se démarquer, mais à force de s'éloigner du premier élan de générosité qui voulait parodier un certain genre de cinéma, l'on tombe dans le pastiche d'une imitation burlesque, ce que la série des Austin Powers avait intelligemment réussi à éviter. Le débile ne suffit pas toujours, mais OSS 117 ne meurt jamais.

En bref : Quand un film très attendu dérive vers la parodie de la parodie, le résultat ne peut forcément pas être exempt de défauts. OSS 117 : Rio ne répond plus manque singulièrement de contenance et tend à se répéter avec une constance qui frise le poil quand on s'attend plutôt à avoir les zygomatiques en feu. Loupé, rire aux mêmes vannes, même si elles sont déclinées sous plusieurs formes, ça lasse avant tout. Heureusement que Jean Dujardin est là pour nous sauver de l'ennui complet.
Kelemvor
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le 3 janv. 2015

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