Où est la maison de mon ami ? nous promène à travers les hameaux des petits villages de l’Iran du nord, en compagnie d'Ahmed qui cherche la maison son ami, Nematzadeh, pour lui rendre son cahier emporté par mégarde. S’il ne lui ramène pas à temps, l’enfant sera expulsé de l’école pour ne pas avoir fait ses devoirs dans le cahier de classe selon l’exigence du maître de la classe. Défilent sous nos yeux les murs en briques de terre ; les animaux qui se promènent dans les rues : poules, vaches, ânes, chèvres ; les gens pris par leurs tâches quotidiennes.


Un peu léger comme sujet de film ! Et pourtant on ne s’ennuie pas car cette histoire ressemble à un conte initiatique. Le premier pas de cette quête de Ahmed commençant par la désobéissance aux adultes puis par la montée d’une colline qui semble à peine réelle tant son aspect semble sortir tout droit d’un décor de film fantastique. Colline que Ahmed gravit en courant le long de son sentier en zig zag. Ce sentier tellement typé a été créé par l'équipe de tournage pour évoquer une route sans fin, aboutissant apparemment nulle part mais conduisant malgré tout quelque part. C'est le genre de route qui peut conduire à de nombreux autres lieux. Comme l'explique le réalisateur:



il y a de nombreuses autoroutes qui ne conduisent pas aussi loin que ce sentier.



A une époque sans portable, sans internet, en ces lieux isolés, en ces villages qui ne comportent pas d’adresses précises, trouver la maison de quelqu’un quand vous ne savez pas où il habite n’est pas une tâche aisée ! L’acteur qui incarne Ahmed est très convaincant et on prend plaisir à le suivre dans sa quête. Les yeux du petit acteur sont d’une grande expressivité. Ils reflètent son désespoir, mais aussi sa détermination, son intelligence et sa droiture.


Ahmed frappe aux portes et interroge inlassablement : où habite Nematzadeh ? Il a d’autant plus de mérite qu’il se heurte essentiellement à des adultes qui ne sont guère loquaces et qui se désintéressent complètement de sa recherche. Chacun ses soucis… Sans compter son propre grand-père qu’il rencontre et qui a des conceptions très précises et très discutables sur l’éducation. Il débite son « idéologie éducative » et formule son idéal : l’obéissance au doigt et à l’œil pour faire des enfants des sujets « utiles à la société ». Face à lui se tient son petit-fils qui n’obéit pas, mais suit son cœur et qui se montre bien plus utile ainsi en cherchant concrètement le bien concret d’une personne concrète ! Ahmed est tout le contraire de ce que son grand-père attend d’un enfant. Durant plusieurs heures, il va braver ainsi les interdits des adultes, se battre seul pour sauver son ami de l’expulsion de la classe qui le guette s’il ne lui ramène pas ce fameux cahier à temps.


La situation s’aggrave, au début Ahmed obtenait des adultes une oreille distraite, mais il finit par n’être même plus du tout entendu ! Il répète inlassablement sa question comme un disque rayé sans que personne ne l’entende ni ne le voit ! Les adultes sont dans leurs mondes et le pauvre gamin dans le sien, totalement incompris. Il vit un véritable drame, un drame d’enfant mais pour lui un drame bien réel ! Il se sent responsable de son ami et c’est cela qui donne valeur à sa quête et sa désobéissance. Au terme de cette longue recherche, la nuit étant tombée, il trouvera une solution. Et cela il le devra une fois encore à son cœur et à sa capacité de réflexion personnelle, aux antipodes des carcans du prêt à penser du monde des adultes et de cette société fermée. Au final, on ne peut que constater qu’il est la seule personne censée de cette histoire face à ces adultes butés, obtus, figés !


Un très joli film qu’apprécieront les personnes qui ne craignent pas le manque « d’action ». Le film est très lent, et il s’y passe peu de choses. C’est un film atypique, à la fois réaliste, poétique et semblable à un conte de fée sans fées. Les paysages semblent tout droit sortis d’un autre monde., certains plans comme ceux qui sont tournés la nuit, ressemblent à un rêve, le vent qui s’engouffre dans la chambre une fois Ahmed rentré semble personnifier les « forces infernales » déchaînées contre lui. Si on accepte d’entrer dans ce monde, alors on ne sera pas déçu par le voyage !


Où est la maison de mon ami ? Est le premier volet de la trilogie de Koker. Il est suivi de Et la vie continue (1992) et de Au travers des oliviers (1994). Trois films aux histoires différentes mais tous reliés les uns aux autres.

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le 19 avr. 2022

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abscondita

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