J’avais quelques appréhensions à reprendre Kiarostami après une des séances les plus douloureuses de ma jeunesse, l’abominable, prétentieux et chiantissime Goût de la cerise, le genre de films qui n’existent que le temps des festivals internationaux et qui sont souvent la meilleur raison de vouloir les éradiquer de la surface de la planète.

Mais là, pour le coup, on m’avait promis quelque chose de plus léger, mes éclaireurs étaient presque tous dithyrambiques, ça dure 1h25, Adobati fait l’effort de me le refiler, je me surprends à lancer le film avec espoir et grande curiosité.

Alors, c’est l’histoire d’un Petit Nicolas Iranien, d’ailleurs, il s’habille comme le nôtre, il a la même tête aussi, une gentille bouille de bambin et il va à l’école, même que pour éviter que son petit camarade se fasse engueuler par le maître demain, faut qu’il lui rende son cahier dans la soirée, ce qui n’est pas simple quand on ne sait pas où il habite et quand tout le monde semble vouloir l’empêcher d’y parvenir.

Petit conte trop didactique réalisé dans le cadre d’un institut étatique éducatif, le film aurait pu être charmant s’il n’était alourdi en permanence de défauts impardonnables.

Tout d’abord, c’est gentil d’avoir pitié de l’état du cinéma perse, mais il n’empêche que la pellicule est dégueulasse, que la mise en scène est limitée et les cadrages parfois approximatifs. Et puis, les comédiens amateurs, c’est sympa, mais parfois ça se voit trop, ça fait tâche, certains gestes semblent tellement artificiels que j’en sortais presque de l’histoire… Même le gentil gosse à un moment, sa mignonne mine tristoune cesse d’émouvoir pour finir presque par agacer, tant le voir tirer la tronche du début à la fin du film commence à devenir un tantinet pesant.

Il faut dire que le plus gros défaut du film, c’est son infinie lourdeur de ton. Les pérégrinations du gosse auraient pu être palpitantes, curieuses, émouvantes, révélatrices de mille et un détails de cette vie dans les provinces du Nord du pays que j’avoue mal connaître et que je suis content de découvrir. Malheureusement, pour nous faire comprendre l’incompréhension qui existe entre le gosse et les adultes et, plus généralement, le sentiment d’oppression qui domine parfois, Abbas le pas finaud ne connait qu’une seule astuce : faire répéter encore et encore tous les dialogues six ou sept fois entre les adultes et les enfants. Ca commence avec l’instituteur qui torture ainsi à la fois son élève et le spectateur et puis, ça ne cessera jamais jusqu’à la fin du film, gâchant toutes les scènes les unes après les autres après un artifice d’une grossièreté infinie et d’un résultat abrutissant.

Alors, c’est dommage, derrière le côté trop calibré du film qui a l’air d’avoir, lui-aussi, déjà, été conçu pour émouvoir les bonnes consciences occidentales des festivals interchangeables, il y avait une belle histoire, et même une chouette idée, au milieu, à cause d’un pantalon, mais tout cela s’effondre presque à cause d’un détail pénible répété jusqu’à l’infini.

C’est toujours très ennuyeux dans les films se prétendant proches du réel de tout gâcher par des artifices aussi grossiers, ça donne l’impression que le réalisateur se paye notre fiole, qu’il nous raconte finalement des conneries… Surtout, ça m’a désintéressé petit à petit de l’histoire, je n’ai pas pu profiter de la fin maladroite et un peu prévisible mais qui aurait dû être touchante malgré tout…

N’empêche, ça restait infiniment plus supportable que le tombereau d’ennui cité en introduction…
Torpenn
5
Écrit par

Créée

le 2 juil. 2013

Critique lue 2K fois

25 j'aime

26 commentaires

Torpenn

Écrit par

Critique lue 2K fois

25
26

D'autres avis sur Où est la maison de mon ami ?

Où est la maison de mon ami ?
Nushku
8

Conte iranien

Premier opus de la trilogie dite de Koker qui prend place dans le nord de l'Iran, "Où est la maison de mon ami" est une petite fable réaliste sur l'enfance ; dramatique et comique à la fois mais...

le 27 févr. 2011

27 j'aime

1

Où est la maison de mon ami ?
Torpenn
5

Le Persan à sornettes

J’avais quelques appréhensions à reprendre Kiarostami après une des séances les plus douloureuses de ma jeunesse, l’abominable, prétentieux et chiantissime Goût de la cerise, le genre de films qui...

le 2 juil. 2013

25 j'aime

26

Où est la maison de mon ami ?
Morrinson
7

Aléas de l'enfance

Il y a dans Où est la maison de mon ami ? la simplicité aigüe d'un récit d'apprentissage au cœur même de l'enfance et la sincérité la plus touchante pour en décrire les peurs ainsi que les urgences...

le 16 juil. 2020

18 j'aime

Du même critique

Into the Wild
Torpenn
5

Itinéraire d'un enfant gâté

A 22 ans, notre héros, qui a feuilleté deux lignes de Thoreau et trois pages de Jack London, abandonne sans un mot sa famille après son diplôme et va vivre deux années d'errance avant de crever comme...

le 17 nov. 2012

471 j'aime

182

Django Unchained
Torpenn
4

Esclavage de cerveau

Aussi improbable que cela puisse apparaître à mes lecteurs les plus obtus, j’aime bien Tarantino, je trouve qu’il arrive très bien à mettre en scène ses histoires, qu’il épice agréablement ces...

le 22 janv. 2013

395 j'aime

174

Le Parrain
Torpenn
10

Le festival de Caan...

Tout a déjà été dit sur ce film, un des plus grands jamais réalisé. Tout le monde a vanté, un jour son casting impeccable : un Brando ressuscité, un Pacino naissant, bien loin de ses tics...

le 6 janv. 2011

366 j'aime

131