Certes on devine l'attachement de Shinoda pour son personnage candide et lyrique, Saeko, projetant en médiatrice sincère ses propres sentiments sur le jeune ouvrier amoureux de sa sœur ainée, lequel accepte sereinement sa condition modeste en marge du progrès matériel. Mais l'écriture des rôles, à travers ce triangle amoureux, est nuancée, et aboutie finalement à un jugement assez peu accusateur, voire tout à fait compréhensif pour les uns et les autres. On voit Matsumoto corrompre, amadouer Keiko avec de jolis cadeaux, promesse d'une vie prospère, mais ses sentiments à son égard semblent aussi bien réels. En parallèle, la pureté de Komakura n'est peut-être pas si définitive ? Il est humble mais son existence laborieuse, épuisante, le pousse à boire tout comme le père des sœurs, et il n'est pas impossible que ce point commun soit l'indice d'un possible comportement conservateur en devenir, réactionnaire, reproduisant les mêmes freins à la marche du progrès des mœurs. En dernier lieu, le père saura accepter le choix de sa fille, assez pragmatique mais pas cruel, Keiko avouant n'avoir aimé Komakura qu'en tant que frère de substitution - le sien étant décédé des années auparavant.

Mise en scène très différente de "Killers on Parade" (1961), pour un sujet à valeur sociale. Retour au noir & blanc, rien des audaces cartoonesques, plus classique. Mais davantage d'incursions néoréalistes. Quelques travellings travaillés avec précision. Toujours un peu trop bavard à mon goût, enchainant des scènes dialoguées où les protagonistes ont les yeux dans le vague. Scénario assez riche.

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le 5 mai 2024

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