Paprika
7.6
Paprika

Long-métrage d'animation de Satoshi Kon (2006)

      Le Cinéma repose sur un principe fondateur dans toutes les productions filmiques, c'est-à-dire le mouvement qui va transmettre l'émotion et le savoir-faire des artistes par l'illusion optique. La technicité évolue tout comme le support et les thèmes, où nous passons d'un sujet de divertissement à des histoires plus tangibles par les années qui suivent, et qui nous indiquent une sorte de confrontation perpétuelle. Ce geste dissocie deux notions qui sont en soit complémentaires, étant donné que le fait de divertir présente des émotions et des sujets fondateurs, et l'action de faire réfléchir le public ne va pas se résumer à se prendre la tête. Cette première réflexion qui semble à juste titre comme à côté de la plaque par rapport à la critique en général, est pour moi en réalité très profonde, car cette opposition anime l'évolution du domaine cinématographique, et se traduit dans l'inconscient collectif par l'attirance du réel impliquant toutes les problématiques sociétales, face à celui du rêve distordant la réalité et sujet à l'émerveillement. Pourtant, ce dernier point peut être très vite confronté à des séries de contradiction, démontrant que l'essence même du cinéma est l'altération de la réalité, et que par conséquent le rêve peut ramener au réel. Or le meilleur exemple pour expliquer tout ça, est dans ses origines c'est-à-dire l'animation, qui illustre que ce qui n'existe pas dans la nature est présente dans la réalité par la création des animateurs, ayant été fabriqué par une main humaine. Les films d'animations sont une source d'émotion évocatrice, sinon il faudrait expliquer la raison pour laquelle nous croyons quelque chose que nous savons par avance comme fabriqué et assemblé. Parmi les auteurs qui suscitent cette admiration pour leurs pattes, Satoshi Kon fait parti de ceux qui ont compris l'importance de l'image dans la réalité, et que ce qui est impossible devient désirable. Comparable à Philip K. Dick et à Terry Gilliam, deux maîtres dans leurs domaines qui ont traité de la bataille entre la réalité et le rêve, la place d'un individu dans un monde en constante évolution, et surtout la vérité au-delà de la perception physique, Satoshi Kon retransmet cette émotion dans son inventivité, et dans ses œuvres. De Perfect Blue à Tokyo Godfathers, sa trace est indélébile dans l'animation et même dans le cinéma en prise de vue réelle. Toutes ses obsessions et son amour pour le septième art se retrouvent dans Paprika réalisé en 2005. 

Avant de parler proprement du film, nous pouvons aborder l'influence qu'a reçu Satoshi Kon de la part de Terry Gilliam. Son œuvre a influencé grandement l'imaginaire collectif, et beaucoup de thèmes issues des long-métrages du réalisateur japonais, ont été plus ou moins exploré par l'imaginaire Gilliamesque. Par exemple, Kon a traité des points de vue des sans-abris de Tokyo en y implantant une vision biblique, tout comme Fisher King qui est sur ceux de New-York au travers du conte Arthurien. L'esthétique de Terry Gilliam traite souvent de l'enfermement de l'esprit, qui essaie de survivre au monde qui l'entoure, et pour ne pas vriller le personnage décide de se rapprocher de son monde superficiel, brouillant la frontière entre réalité et rêve. Brazil a sans doute, malgré les nombreuses différences qui sont notables, influencé l'ambiance et la mise en scène de Perfect Blue, de par le traitement de la lumière et du milieu urbain, mais aussi par la psychologie des personnages, particulièrement l'impuissance de leurs rêves face à ce qu'ils semblent être dans la réalité, laissant un goût amère à la fin. Millennium Actress explore la manière dont les films inspirent la vie, et qu'aussi cette dernière influence le cinéma, à tel point que nous ne savons pas si le personnage s'est inventé sa propre vie. Du côté de Gilliam, Les Aventures du Baron de Münchhausen propose ce traitement, mais cette fois-ci par le biais du théâtre, où la narration est à la fois racontée mais aussi vécue en même temps. Pour Paprika, en soit on pourrait citer tous les films de Gilliam qui sont venus avant, mais j'ai pensé à un film sorti quatre ans après, L'Imaginarium du Docteur Parnasus qui possède quelques points communs, montrant la simplicité en surface du rêve, mais pouvant se révéler comme une action infiniment grande, et aussi explorant la mentalité de son propre créateur, Gilliam s'interrogeant sur lui-même, se donnant le mauvais rôle par le personnage de Parnasus.

Satoshi Kon est semblable à Terry Gilliam par la construction de son récit, mais aussi par sa manière de composer l'espace et le temps, tous deux dilatés pour proposer la représentation même du vertige de l'esprit. Le réalisateur japonais est un pilier immense de l'industrie de l'animation. Malgré sa mort en 2010, il continue à fasciner le spectateur. Il n'a certes pas apporté une nouvelle façon de faire, mais il est devenu un maître par sa manière de réfléchir son médium. En effet, la plupart des films d'animations ne jouait pas forcément sur un rythme ou sur un raccord en particulier dans le travail du montage, mais Satoshi Kon apporte ce point de vue dès Perfect Blue, et l'intensifie dans Paprika à partir des premières séquences. Rien que le générique s'ouvrant sur une route infinie est une démonstration des prouesses visuelles que le film promet. Chaque transition entre deux plans issues d'un milieu qui diffère prolonge le mouvement de départ. Le jeux de disparition et d'apparition de Paprika ne choque pas la rétine, puisqu'il est tellement travaillé que cela forme une harmonie visuelle. Ce travail permet de lier différents imaginaires en une seule, avec le moment où Paprika prend place sur une fusée dont le design me fait un peu rappeler le style de Osamu Tezuka, père du manga moderne, évoquant ainsi une histoire de l'animation japonaise. L'animation de Paprika peut évoquer un déplacement marquant d'un personnage dans Perfect Blue, et le travail de la lumière et du reflet permettent le balancement entre deux espaces distincts, relevant aussi chez nous une impression étrange de savoir quand nous passons dans la réalité physique, puis celui de l'imaginaire (Le moment où elle parle à deux inconnus nous indiquent une réalité physique, puis elle s'enfuit en traversant l'image incrusté sur un tee-shirt). Or si notre regard est subjugué par ces différents sauts, le spectateur l'est davantage lorsque cela implique directement les dialogues. La première scène de la parade impressionne parce qu'on s'est rendu compte qu'au moment du saut du Professeur Chima qu'on a été berné par Satoshi Kon. Ce dernier a tellement bien réussi sa manipulation que l'on est passé d'un moment de tension à une paranoïa d'un personnage mégalomane sans qu'on s'en rende compte. Il révèle ensuite ce que le personnage racontait d'invraisemblable était un rêve, et qu'en fait nous étions dans son subconscient depuis le début. Par ailleurs, le visuel de la parade démontre que Kon a réfléchi profondément pour transposer le roman Yasutaka Tsutsui, tout en proposant sa propre vision en partant de zéro, ayant reçu de la part de l'auteur carte de blanche pour l'adaptation. Le travail du storyboard est magistral, perfectionnant un plan en prévoyant ce qui va suivre ensuite, créant une cohérence dans un univers illogique.

Par la suite, l'autre influence considérable est l'auteur de science-fiction culte Philip K. Dick, qui dépeint avec justesse un monde qui se développe trop bien, qu'il y a quelque chose qui cloche dans cet univers. Souvent pris par des angoisses constantes, l'écrivain a su complexifier son œuvre par des questionnements cartésiens où tous les thèmes se rejoignent en un même point, sur la frontière même de l'individu, de ce qui fait de lui un être par son essence. Que ce soit Ubik ou Les Androïdes rêvent-ils de moutons mécaniques, Philip K. Dick traite de ce qu'est notre subconscient, où les personnages ne se limitant pas à ce qu'ils croient être, vont essayer de survivre en voulant ne plus douter, et cela se fait par l'esprit, pouvant révéler notre plus grande richesse mais aussi nos plus grandes faiblesses. Or cela fonctionne dans le long-métrage de Satoshi Kon, puisqu'il questionne constamment le subconscient des personnages. Il le fait en les plaçant dans l'obscurité de l'esprit qui peut-être soit les ténèbres de l'océan, le désert infinie, ou le désordre de la forêt, et par la suite le réalisateur place un élément qui émerge, et qui est beaucoup plus grand qu'on ne le pense. Le tout premier plan résume tout ce qu'on va avoir après, une toute petite voiture arrive de l'obscurité, puis la porte s'ouvre et un clown en sort. Satoshi Kon a expliqué dans une interview qu'il illustre le film par une scène banale en apparence, mais révélatrice dans la construction du récit et du visuel. La scène de la voiture avec le professeur Chima et la doctoresse Chiba Atsuko se concentre sur une goutte qui fusionne à une autre formant une plus grosse goutte, et selon lui, cela représente la fin de Paprika. L'accumulation d'éléments du rêve du commissaire Konokawa permet de renforcer la réflexion de Descartes où la seule chose que je ne peux pas douter c'est le moi dans ce délire constant, et plus nous poussons le personnage dans ses limites, plus nous atteignons son essence, que j'expliquerai dans la dernière partie. N'ayant pas apprécié ce qu'il a fait avant dans Millennium Actress mis à part pour "Run", le compositeur Susumu Hirasawa propose une composition qui illustre parfaitement la réflexion du film sur l'esprit humain. "The Girl in Byakkoya" donne cette sensation de frénésie que peut avoir nos rêves, et la fantaisie qui s'en dégage par la voix du chanteur qui sort de ce tourbillon de notes de synthé. Egalement, la musique de la parade représente de son côté parfaitement le dérèglement de l'esprit et de la logique, rythmant ce rêve mégalomane où on a véritablement cette idée qu'une petite chose peut cacher quelque chose d'autre. Parallèlement, on pourrait parler de la similitude des deux auteurs à placer un personnage féminin qui révèle à quelqu'un que son monde est faux, que ce qu'il vit peut-être vrai dans ce qu'il ressent, mais que les parois de cette réalité sont factices (Représenté dans le film lorsque Paprika explore un coin du rêve qui semble être oublié ou fragile comme le miroir qui se casse, ou l'espèce de boue noirâtre issu de celui qui veut contrôler les rêves). Pour Philip K. Dick c'était la fille aux cheveux noirs avec toujours pour chaque roman une similitude physique, et cela se remarque chez Kon avec Paprika, où le character design est aussi présente dans Tokyo Godfathers, et le film qu'il n'a jamais pu réaliser Dreaming Machines. Elle est le symbole de la science et de la lumière, qu'on peut traduire comme une révélation de soi, évoquant souvent les tourments émotionnels de Chiba Atsuko et Konokawa, qui sont représentés par l'obscurité. L'interprétation de Megumi Hayashibara, jouant à la fois Paprika et aussi Atsuko permet de rajouter le thème de la dualité, puisqu'elles possèdent deux personnalités qui s'opposent. Paprika pourrait être une vision idéalisée de Atsuko, par son assurance et sa manière de pensée. Cette actrice réussit par le travail de la voix à transposer deux caractères très différents, l'une est pragmatique et l'autre est insouciante. Or on pourrait appliquer cette figure du double au Docteur Tokita avec Onasaï partageant les même traits physiques, mais à la différence le premier est une version idéalisée plus fragile et plus naïve, et le dernier est plus adulte semblant ne pas vouloir fuir. Le Docteur Chima et le président Inui partagent une même vision sur le rêve, et ont aussi une personnalité mégalomane. Cette confrontation entre réalité et idéalisme se retrouve dans l'esthétique même de la ville, où d'après le directeur artistique, le monde réel est associé à un ton neutre et rude, tandis que celui du rêve possède des couleurs vives, présentes sur les vêtements des personnages. Par les dialogues et l'esthétique, Satoshi Kon propose une interrogation sur la contamination de la réalité par les rêves et inversement, permettant de proposer indirectement une critique de la société japonaise au travers de l'image de la parade, qui démontre que la réalité est déjà surréaliste en soi. Les suicides qui représentent un sujet très sensible au Japon, la perte de repère entre l'iconographie de la tradition et de la modernité, la démultiplication de la culture et de la religion, le traitement de l'image de soi, ou encore les politiciens s'appropriant le pouvoir illustre une forme de perte d'identité, et d'ambition personnel. Le travail de l'animation sur le rapport au corps et à la matière est surprenante car on a l'impression de cette perte de contrôle et surtout d'identité, particulièrement la scène où Paprika cache dans son corps le subconscient de Atsuko.

Paprika brasse énormément de thèmes qui ne se résument pas seulement à la frontière entre rêve et réalité. Rien que la perte d'identité, le sentiment d'avoir un double, et l'ambition personnel participent à la complexité de l'œuvre de Satoshi Kon, au travers du commissaire Konakawa et Paprika. On apprend au cours du film que ce premier était un jeune cinéaste qui n'a jamais terminé son court-métrage, possédant une forme de culpabilité à l'égard de son alter-ego qui est traduit comme un ami, mais qui pourrait être tout simplement le même personnage, sa vision de lui-même ayant poursuivi son rêve. Dans une interview, Kon a la sensation d'être deux personnes, Satoshi et Satoshi Kon, le premier concernant sa vie de famille et le deuxième sa vie de réalisateur, permettant par le biais du commissaire de créer un lien entre le réalisateur et son public, formant une empathie envers lui. Konakawa est représenté un moment donné sous les traits d'Akira Kurosawa, réalisateur dont l'influence n'est plus à prouver, qui est souvent cité par Kon que ce soit Le Château de l'Araignée, La Forteresse Cachée ou Rêves probablement, et cela est touchant de le voir nous enseigner sur le Cinéma, alors qu'il a toujours dit ne l'avoir jamais compris. Paprika symbolise aussi l'inventivité, le mouvement, la lumière et par conséquent le Cinéma, puisque c'est par elle que nous trouvons un autre principe à la fois divertissant et aussi intéressant comme objet de réflexion, la métafiction. Cette dernière est une écriture qui est consciente de son état d'objet, et qui fait référence aux mécanismes même de la fiction. Ce qui est le cas par la présence de référence à un langage cinématographique expliqué directement aux spectateurs, à des références extérieurs qui sont représentés par nos personnages (Tarzan, Sous le plus Grand Chapiteau du Monde, ou encore Vacances Romaines), ou même des allusions à ces propres œuvres. Ce dernier élément permet de transposer Paprika en un requiem féerique. Ne sachant pas forcément si Satoshi Kon a eu connaissance de sa maladie lors de la création du film, nous ne pouvons que supposer ou imaginer cette idée que le réalisateur a voulu donner un long-métrage qui résume tout, donnant l'impression qu'il a eu peur de mourir en laissant rien, ou en ne terminant pas réellement son œuvre. Que ce soit le doute de Konakawa qui semble se tuer en n'ayant pas accompli sa carrière de réalisateur, ou le fait que Kon nous renvoie au film qu'il n'a jamais pu faire Dreaming Machines, le réalisateur voit tout le chemin traversé avec ses précédentes œuvres, et nous transmet un doute sur son héritage, et son envie de revenir à sa période où il étudiait. Ce doute nous est présenté dès le départ par la multitude de visages similaires de Konakawa, qui possède une ambiance très malsaine comme dans un rêve qui vrille au cauchemar. Satoshi Kon offre au spectateur un divertissement profond par le travail de l'animation et du rythme du récit, tout en lui faisant réfléchir sur ce qu'il est, et sur ce qu'il rêve. Paprika est un film qui a compris l'intérêt de l'illusion, puisqu'il implique le spectateur à avoir une attention aux détails, et surtout à revoir constamment les règles pour s'échapper du rêve. On pourrait encore parler du film sous différents thèmes, particulièrement freudien, mais l'auteur Tsutsui, qui est la source d'inspiration de Satoshi Kon ayant lu le livre dès sa parution, conclut parfaitement l'intérêt que suscite Paprika ("Avec un petit remaniement, on pourrait en faire des nouvelles, en parlant de ses rêves. Certaines personnes disent que l'on triche si l'on se contente de transférer le contenu de ses rêves en roman. Moi je dis que transcrire la réalité, c'est tricher. Je dois exploiter mes propres rêves et expériences. On commence par envisager d'altérer ses rêves. Les rêves sont notre subconscient. Je fouillais dans mes rêves, mais je ne suis pas thérapeute et lorsque j'essaye de le faire, je ne sors plus du rêve. Il m'est arrivé de faire un rêve vraiment horrible et d'avoir une absence le lendemain juste devant le miroir. Depuis cette expérience, j'évite de trafiquer mes rêves. ").
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le 20 janv. 2022

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