Colocation : déboires et prospérité.
Ce qui frappe d'abord dans Parade, c'est l'intelligence du récit. Là où on aurait pu craindre un drama mélodramatique et hystérique, ou au contraire une analyse auteurisante clinique et lourdingue de cette bande de colocataires, on se retrouve ici face à un film à la fois étrangement léger et pesant, dans ce qu'il montre, dans ce qu'il suggère. Un équilibre parfait: Yukisada prend son temps pour nous décrire ses protagonistes, mais juste ce qu'il faut, sans longueurs.
L'idée de découper le film en quatre chapitres, permettant de découvrir les facettes secrètes de chacun des quatre habitants au fur et à mesure, est extrêmement bien exploitée - bien que vue et revue. L'arrivée d'un nouvel habitant (ou plutôt squatteur), jeune prostitué péroxydé, sert de point de départ à une série de révélations intimes et d'évènements troubles, alors même qu'un meurtrier rôde dans leur quartier. Sans enjeu dramatique précis, et avec son final un peu trop expéditif, Parade est ce qu'on pourrait appeler "une tranche de vie" (dieu que je déteste cette expression, à mettre dans le même panier que "petit bout de femme"...), mais une tranche de vie rythmée et passionnante - pour peu qu'on s'attache aux personnages, mais ce ne sera pas difficile.
Plus sombre qu'il n'en a d'abord l'air, cette histoire de jeunesse paumée dans la jungle tokyoïte (même si là n'est pas le sujet) reste toujours sincère, sans jamais juger quiconque, même dans les vices les plus secrets de chacun. Et que les réalisateurs de nos latitudes en prennent de la graine, car Isao Yukisada a réussi, en partant de stéreotypes (légers), à dépeindre la jeunesse (une certaine jeunesse?) actuelle comme rarement, glorieuse et incertaine.