Glasgow : du dépotoir à la lune.
Douze ans avant le génial We Need To Talk About Kevin, la rare Lynne Ramsay réalisait son premier long-métrage : Ratcatcher, divagations poético-morbides d'un gamin de 12 ans ayant commis le pire dans le Glasgow industriel et dégueulasse des années 70.
Comme dans ses films suivants, on retrouve déjà cet étonnant sens de l'image - héritage naturel de ses études de photographie - et du son (la BO est excellente). Même si le cadre est sordide et laid (canaux bourbeux et poubelles éventrées, on a vu plus acceuillant), elle réussit à envelopper cet ensemble d'une grace bringuebalante et profondement sincère. Composé d'un casting de non-professionnels d'une justesse remarquable, Ratcatcher tient surtout du petit miracle quand il s'agit d'exposer les états d'âmes troubles et immatures propres à la fin de l'enfance, des perceptions qu'on aurait pu penser oubliées. Un brin sensoriel, dur dans sa description d'un réalisme social très britannique, le film s'aventure par instants dans la promesse d'un onirisme fragile (le rat volant vers la lune).
Plus que la naissance d'une des cinéastes les plus intéressantes de notre époque, il s'agit avant tout d'un film d'une exactitude surprenante quand il s'agit de brosser un portrait de l'enfance dans ce qu'elle a d'âpre et de possiblement doux. Et de ne jamais tomber dans l'écueil de trop mettre en avant le drame initial de l'intrigue.