Ce film n'a pas dû être facile à tourner. Même plus de 20 ans après la libération de Paris, le sujet restait très sensible.
René Clément a dû composer avec les exigences de tous pour des raisons politiques ou des questions d'ego, tant des personnages représentés que des acteurs.
Le parti communiste a toujours veillé à son image de parti résistant au cinéma pour faire oublier son engagement tardif. De Gaulle a fait supprimer le personnage de Bidault, successeur de Jean Moulin à la tête du Conseil National de la Résistance en raison de ses engagements avec l'O.A.S. dans la guerre d'Algérie. Rol-Tanguy a choisi lui-même l'acteur qui le représentait. Tous ont veillé à ce que leur rôle ne soit pas minimisé et à paraitre sous leur meilleur jour. Même le personnage de Von Choltitz a été représenté selon ses mémoires. Il n'est pas certain qu'il ait été aussi exemplaire.
Ainsi, l'un des éléments qui ont décidé Von Choltitz à épargner Paris est incontestablement l'ultimatum envoyé par Pierre Billotte, alors colonel à la tête d'un des trois groupements de la 2ème DB: « Au cas où vous jugeriez bon de poursuivre une lutte qu’aucune considération d’ordre militaire ne saurait justifier, je suis décidé à la poursuivre jusqu’à l’extermination totale. Dans le cas contraire, vous serez traité conformément aux lois de la guerre ».
Malgré tout, René Clément est parvenu à réaliser un film proche de la réalité historique. Un soulèvement prématuré qui a couté la vie à de très nombreux parisiens et aurait pu tourner à la tragédie sans l'arrivée des alliés, mais qui eut l'immense mérite de permettre aux parisiens de s'être libérés eux-mêmes au regard de l'histoire.
Le film nous montre une grande foire où l'on tire à balles réelles, une fête où l'on meurt aussi bien que dans n'importe quelle guerre avec des situations parfois surréalistes, bref la libération de Paris, une ambiance unique, une kermesse sanglante.
Peu avant, ont eu lieu les massacres de Varsovie. Comme Paris, cette ville s'est soulevée avant l'arrivée des troupes alliées. Les russes ont stoppé leur avance le temps que les allemands anéantissent la résistance non communiste et une partie de la population. Il n'est pas exclu de penser que les américains aient eu le même projet à l'égard d'une résistance qu'ils jugeaient communiste.
C'est aussi cet aspect très tendu que rend bien le film.
Mais lorsqu'ils finissent par céder aux exigences françaises et au regard de l'histoire, ce n'est pas seulement la 2ème DB française qu'ils détournent vers Paris, mais aussi la 4ème DB américaine. Ils ne peuvent être absents de cet évènement.
Pour Thekla, je signale que l'unité que Leclerc envoie en pointe, N'est pas la 9ème division, mais la 9ème compagnie, dite "La nueve" car elle est composée en majorité de républicains espagnols engagés dans les Forces Française Libres. On la reconnaîtra dans le film, car elle est menée par la jeep baptisée "Mort aux cons".
Alors même s'il est impossible de faire cohabiter tous les souvenirs contradictoires et tous les intérêts inconciliables, même si le film verse parfois dans le style pompier, il a le mérite d'exister et de rappeler un épisode important de l'histoire. C'est aussi une déclaration d'amour à la ville de Paris et à son passé historique.
Outre un des génériques les plus extraordinaires de l'histoire du cinéma, on peut reconnaitre quelques futures notoriétés ou anciennes stars parmi les figurants: Michel Berger, Suzy Delair, Patrick Dewaere, Michel Fugain, Michael Lonsdale, Michel Sardou, etc...
A vous de les repérer...
...et la liste n'est pas exhaustive!