Texte initialement publié ici le 8 juillet 2020
Présenté pour la première fois au Festival de Toronto en 2016, c'est en aout 2020 que le film de Sofia Exarchou arrive enfin sur les écrans français.
Nous y sommes assez immédiatement plongés dans une chronique adolescente, dans laquelle différents personnages, pas toujours développés se confrontent à un monde en décrépitude.
Si la France a pu redouter le « monde d’après » suite à la pandémie de la Covic-19, la Grèce elle, fut bel et bien confrontée à « un monde d’après ». Un monde d’après la crise de la dette publique survenue en 2008. Autrefois l’une des économies les plus dynamiques de l’Europe, la Grèce s’apparente à ce stade à l’abandon, régulièrement fréquenté par une jeunesse en pleine errance. Aucune réelle autorité parentale ne sera visible, comme le peuple Grec pourrait avoir connu un abandon de la part de ses pouvoirs publics.
C’est dans ce contexte que nous est montré le quotidien de Dimitris et Anna. À l’instar des autres adolescents, tous deux tentent de trouver une vie à vivre au travers de leur idylle en pleine construction. Si Anna semble positive et prête à vivre sa vie, Dimitris n’arrive pas à supporter son absence de but.
Il erre, boit, a beaucoup de mal à garder un boulot stable, et se sert de son chien comme animal reproducteur pour se faire un peu d’argent. À mi-chemin du film nous aurons l’occasion de suivre un trajet des deux tourtereaux tentant de s’extraire de leur quotidien. Un trajet qui se soldera par un retour à la case départ. Un trajet sans point d’arrivée annoncé, une errance sans but, tel seront les leitmotivs du film de Sofia Exarchou.
Leitmotivs qui s’avèreront rapidement être la faiblesse du film. En effet bien que la chronique adolescente ne soit pas dénuée d’intérêt, elle ne semble pas non plus avoir l’ambition de raconter une histoire. Elle montre, à distance. Et bien qu’une telle distance puisse s’avérer efficace dans le cinéma de Michael Haneke, puisqu’elle permet de suivre et de nous réapproprier le parcours des personnages, ici le spectateur ne se réappropriera rien. Nous sommes dans une telle neutralité que l’on pourrait presque questionner la pertinence du format fiction quand la forme documentaire lui aurait sans doute davantage servi.
Cependant, Sofia Exarchou livre un premier long métrage qui présente quelques qualités dans sa manière de cadrer ses personnages. Malheureusement pour elle, cela arrivera à 15 minutes de la fin, mais les dernières séquences esquissent un début de talent qui ne sera pas inintéressant de suivre. Il nous faut également saluer le casting et notamment les deux révélations du film que sont Dimitris Kitsos et Dimitra Vlagopolou, dont l’intensité de jeu et le magnétisme sont les véritables plus-values du film. Il ne nous reste plus qu’à leur souhaiter une belle longue carrière.
Chronique adolescente intéressante, fort bien servie par son casting, « Park » a un point de vue trop général pour permettre une immersion au spectateur. Mais on peut déjà sentir que Sofia Exarchou est une réalisatrice qu’il vaut la peine de suivre. Sans vouloir jouer les Nostradamus, on est prêt à parier que son prochain film risque de faire parler de lui.