Voici un film dont on peut déjà dire qu'il est un parfait témoin archéologique de son époque : le début des années 1970.
C'est-à-dire, juste après soixante-huit alors que la société est juste en train de commencer à bouger ...
Les pulls de Miou-Miou (leur forme large et les couleurs vives), les pantalons pat d'eph, la bagnole traficotée de Guybet (une plymouth avec des ailerons, des pots d'échappement chromés ... avec des formes psychédéliques), la platine stéréo dans la piaule de Miou-Miou (mieux que le Teppaz mais pas encore la HiFi), le costard de Bernard Menez (depuis combien de temps, un étudiant, fût-il en médecine, ne s'habille plus en costard tous les jours), la DS 21 du père (standing au dessus de la 404 du français moyen) ?
Pour faire complet, il aurait bien fallu des chansons de Salvatore Adamo ou à la rigueur de Polnareff... Mais ça aurait été trop et surtout n'aurait pas été avec la tonalité générale du film. Donc, restons en là.
Le film est un agréable divertissement qui commence très fort pendant le générique - particulièrement long - avec une course poursuite de deux bagnoles qui ressemble à un ballet de deux voitures dans une superbe et improbable cascade, calculée au millimètre et à la seconde, par Rémy Julienne.
Sans risquer de trop dévoiler le film, l'histoire peut se résumer à un road movie dans lequel les personnages cherchent à se débarrasser d'un encombrant cadavre.
La réalisation est à la hauteur pour donner du rythme à toutes ces péripéties avec des gags nombreux et des scènes savoureuses.
Le comique repose en partie sur le casting vaudevillesque qui associe des personnages en principe incompatibles. Un Bernard Menez dans un personnage appelé Michalon, étudiant et fils d'un autre Michalon joué par Jean Lefebvre, chef d'entreprise et chaud lapin.
Jean Lefebvre, chef d'entreprise et chaud lapin avec plein de maîtresses, il y a un loup quelque part.
On découvrira assez rapidement que l'argent (qui vient de sa femme) permet bien des facilités et masque bien des faiblesses.
Bernard Menez dans le personnage d'un étudiant, (en principe) sérieux mais qui se laisse mener par le bout du nez, est complètement incompatible avec les deux autres jeunes avec qui il est forcé de s'allier, Henry Guybet et Miou-Miou. Mais cette association, qui se transforme en un triangle amoureux (pour de rire), conduit à des scènes cocasses.
Henry Guybet joue un personnage dont je me demande bien s'il en existe encore aujourd'hui. Le gars qui ne s'en fait pas du tout, qui a la vie devant lui et pour qui la vie n'est qu'une immense partie de plaisir à mordre à belles dents. Là, on sent par exemple qu'il a transformé sa belle américaine en un objet sensationnel, un truc utile, certes, mais pour en faire un outil de plaisir, de jouissance. "C'est de la bagnole ça"
Miou-Miou est dans la période que je préfère de sa carrière où elle joue les fausses ingénues, les jeunes femmes passionnées capables de s'enflammer pour des idées ou encore capables de haïr d'un même mouvement. Gentiment séductrice, follement séduisante. Là, dans le film, Lautner fait de splendides portraits d'elle, notamment au début dans son appartement alors qu'elle est désemparée par ce qui lui arrive.
Les seconds rôles du film sont très bien choisis entre Maria Pacôme en épouse philosophe de Michalon, Anny Duperey en une truculente maîtresse ou Renée Saint-Cyr en toubib fatiguée.
Mais il y a aussi très brièvement Jugnot en serrurier, Robert Dalban en un concierge d'hôtel un peu dépassé par les nouvelles mœurs ...
C'est un film dont l'intrigue ne casse pas trois pattes à un canard mais dont le rythme est enlevé et très enjoué. Le comique est encore efficace après plusieurs visionnages.