Un sale type taiseux, violent et crasseux (enfin, je crois, son collègue lui conseille d'aller se doucher avant son entretien avec la juge) fait des ravages d'abord dans la mafia colombienne qui sévit en Espagne, puis dans d'autres milieux dont je ne dirai rien pour ne rien vous gâcher, à mesure que progresse ce qui finit par être une enquête et ne ressemblait pas à grand-chose d'autre qu'une beuverie ayant dérapé au début. Cette mutation souterraine est tout le sujet de ce film qui joue à fond les codes du film noir pour se jouer d'eux, et de nous, et nous malaxe longuement pour opérer des revers de sympathie assez acrobatiques. Le malabar hirsute qu'on suit plan après plan n'est pas exactement de bonne compagnie. Ou alors comme le serait un rottweiler vieillissant et pouilleux recueilli dans une décharge un soir de pluie et auquel on aimerait offrir quelques croquettes, mais on se rend compte qu'on n'a tout jeté à mort de son caniche adoré et que le frigo ne contient plus que de la bouffe végan à la mode parce qu'on a sa petite sensibilité animaliste. Bref, autant dire qu'on trouve parfois le temps un peu long à écouter grogner le rustre. Les rares scènes qui permettent de respirer un peu se déroulent dans le bureau d'une jeune juge photogénique mais aux zygomatiques grippés, qui ne se déride que lorsqu'elle parle à sa petite fille au téléphone. Pour lui dire que Maman a du boulot, bien sûr. Bref, dans cette ambiance riante, où les fusillades succèdent aux coups de couteau, on se détend mais surtout on apprécie le contraste toujours un peu étonnant entre le climat riant de l'Espagne et le fait que les gens y traversent quand même des galères. On tirerait presque vers le fantastique, du coup. Pourquoi Diable ces enragés se mettraient-ils sciemment la rate au court-bouillon entre deux palmiers, sous un soleil radieux ? Ne savent-ils pas qu'ils vivent au Paradis de nos retraites envolées ? Enfin bon bref, du coup, il faut dépasser un peu la sidération provoquée par cette anomalie pour finalement rentrer dans une histoire d'un sombre, mais d'un sombre... J'aime bien ça, aussi, chez les espagnols : cette lubie d'avoir un cinéma de dépressifs au pays de la fiesta. Ils sont cools mais pas seulement, finalement... ça les énervait peut-être qu'on le croie.

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le 17 déc. 2019

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