Abel Ferrara qui s’attaque à un biopic de Pasolini, on pourrait penser que c’est un peu comme un bulldozer qui déambulerait à l’exposition Baccarat au Petit Palais ! Il y a de cela, mais pas que… Certes le film occulte partiellement ce qui a fait les fondements de vie du grand maître italien, à savoir le génie de la création et le militantisme politique, ne retenant que le côté sulfureux de ses œuvres et sa vie sexuelle pleine de nuits fauves. C’est parfois un peu convenu, voire confus, mais après tout Ferrara ne cerne que les dernières heures de l’artiste, et ne tient pas à s’étendre sur la dimension sociologique de son œuvre. L’a-t-il ciblée un jour ? C’est un choix qui peut se justifier, d’autant plus que la mise en scène est particulièrement soignée, par ses cadrages aériens, ses lumières glauques ou radieuses et un découpage précis qui martèle bien la fin annoncée. Mais il y a surtout Williem Dafoe qui se glisse physiquement, voire mentalement dans la peau de Pasolini, un mimétisme des plus crédibles au point d’en oublier que nous sommes dans une fiction (lors de l’interview, par un phrasé si spécifique, quand il écrit…). Bien plus que le scénario indigent, c’est lui qui porte une certaine ferveur qui manque au film et nous fait dire que celui-ci n’est pas tout à fait vain et fat.