[Attention, je considère ce texte comme potentiellement spoilant dans son intégralité]
Il y a des séances dont on reste marqué à vie. Je ne pense pas que ce film en sera, mais elle aura marqué mon présent au fer rouge… J'émerge de cette salle obscure un brin choqué par ce que je viens de vivre. Un grand moment de cinéma, comme on en vit peu je pense. Je comprends que ce que je viens de vivre est très personnel, pratiquement déconnecté du film visionné, et de son incertaine qualité. J’ai juste vécu ce film. J’ai été Jim, se réveillant seul sur son vaisseau. J’ai été Jim, vivant l’adolescence de sa solitude, les possibilités qui s’ouvrent à lui. J’ai été Jim, rongé par cette solitude devenue invivable, et par cette acide absence d’espoir et de but. J’ai été Jim, trouvant de l’espoir dans l’amour. J’ai pesé le pour et le contre, j’ai gambergé des heures et des heures avant de me décider à commettre le péché de tous les péchés. Puis j’ai apprécié chaque instant de cet amour naissant, de cet espoir d’une vie possible à deux, repoussant au plus loin dans mon esprit le moment fatidique où l’épée de Damoclès retomberait… Puis la rupture, l’absence de l’autre, l’envie de lui dire qu’elle nous manque tout en sachant qu’elle ne voudra plus nous entendre prononcer la moindre parole. Puis la mission, je devais à tout prix réussir à comprendre, sauver ce vaisseau, rechercher inlassablement le problème sous la tension de l’urgence. Jusqu’à la rédemption, le dernier sacrifice pour sauver mon âme de cet horrible péché tout en sauvant ces 5000 âmes assoupies.
Adieu... il fait froid... l’oxygène vient à manquer… adieu…
Si le film s’était arrêté là, une partie de moi, moi spectateur, serait morte avec Jim ce soir. Là, peut être ce film aurait été de ceux qui marque à vie. Mais les scénaristes ont décidé de sauver mon intégrité psychologique en m’accordant un happy ending. Deux même. Je crois que je ne leur en veux pas, c’était une belle fin. Je crois néanmoins que mes yeux embués de fin de film étaient surtout dues à ma redescente émotionnelle, au sauvetage du vaisseau, à ma survie miraculeuse, et à ce nouvel espoir naissant.
Alors bien sûr, cette dernière phrase n’est pas sans me rappeler la très moquée vidéo de Durandal lors de la sortie de Lucie. Et j’en ai ri, ma critique de Lucie pouvant en témoigner. Mais je crois que ce soir, je viens de le comprendre. Je ne reviens pas sur mon avis sur Lucie, bien sûr que non. Mais je comprends que ce qu’a vécu Durandal ce soir là, est peut être un peu l’équivalent Besonnique de mon expérience. Je sais que ce film ne convaincra pas une majorité de spectateur, il a des défauts, et des incohérences. Mais rien qui ne m’a empêcher, moi, Jim, de vivre pleinement cette expérience.