Ôde à l'amour avorté avant de naître...

"If you leave something behind, you gain something, too". Mais comment fait-on lorsque ce qu'on a perdu a plus d'importance que ce qu'on a obtenu au change ?

Past lives est un film de Celine Song qui retrace l'histoire d'amour qui lie deux jeunes Coréens malgré les années qui défilent et les silences qui rythmaient leur relation, tous les 12 ans.

Déjà, le long-métrage traite de l'amour avec une douceur entremêlé d'une tristesse très poignante, une sensation paradoxalement appréciable. Entre l'amour des pré-adolescents, leurs retrouvailles en tant que jeunes adultes et celles quand ils sont tous deux en couple chacun de leur côté, la réalisatrice passe en revue les occasions manquées, les manques, les sentiments refoulés et les contradictions qui touchent les personnes qui aiment sans vouloir totalement l'admettre...

J'ai aussi beaucoup aimé la mise en abyme quand Nora Moore, le personnage principal, évoque le film "Eternal sunshine of the spotless mind", où les deux personnes font appel à la science pour s'oublier, même si leurs corps veulent se souvenir des jours heureux passés ensemble...

Nora Moore évoque également un mot coréen qui signifie le sentiment que deux personnes ont quand elles se reconnaissent dans une autre vie. Je trouve ce passage emplie d'une poésie très légère.

Outre l'histoire entre ces deux anciens amis qui ont l'impression d'avoir raté l'occasion de vivre une belle relation ensemble, le mari de Nora Moore, au moment des retrouvailles vers 30 ans, doute. Ses "And what if...And what if..." occupent pendant plusieurs minutes l’écran, rappelant que rien n'est invincible, qu'aimer n'est qu'une idée abstraite dont chacun peut avoir sa propre vision, et qu'il est peut-être difficile parfois de déceler la différence entre amour, besoin ou admiration...

Mais il est bon de rappeler que l'amour c'est beau à deux, ça peut faire mal parfois, mais nous sommes maîtres de nous-mêmes malgré tout. "Korea is too small of a country for you. It's not enought to satisfy your ambition", disait l'ancien ami d'enfance de Nora et il souligne par la même occasion que ce qui prime c'est les objectifs personnels. Mais amour et objectifs personnels ne sont pas incompatibles, mais plutôt une question d'équilibre : "It's like planting two trees in one pot : our roots need to find their place".