L’attachement à la figure de Patton saisie dans sa complexité et sa folie fondamentales – le personnage se caractérisant par son langage cru, sa rigueur morale et son sens inébranlable du sacrifice –, le refus du spectaculaire au profit de l’intime, la partition notable de Jerry Goldsmith, tout cela confère certes au long métrage de Franklin J. Schaffner un intérêt qui le distingue des biopics conventionnels. Tairons-nous cependant les longueurs à foison, les nombreuses répétitions et le ventre mou à mi-parcours ? Près de trois heures pour voir s’agiter un acteur au demeurant talentueux, George C. Scott, bluffant dans le rôle-titre mais contraint d’appliquer une série de poses et d’attitudes figées.
Le cinéaste fait alterner les séquences de dialogues opposant à des soldats tantôt peu ambitieux tantôt lâches un général fidèle à ses idéaux avec des séquences de combat qui bénéficient d’une mise en scène efficace et soignée : l’esthétisation du protagoniste principal, d’abord volontairement outrancière, devient plus subtile à mesure que la solitude prend le pas sur le leadership, jusqu’à l’errance ultime en compagnie d’un chien. Mieux, elle revendique une grandiloquence initiale pour mieux interroger son origine et se raccorder aux rêves de grandeur et de gloire du protagoniste lui-même. Les élans patriotiques, l’importance accordée aux symboles, la musique entraînante ne seraient ainsi que les projections mentales d’un fou de guerre soucieux d’imposer à autrui sa vision du monde et de l’honneur ; cette lecture critique du personnage nous invite alors à interpréter l’ouverture du long métrage comme l’exhorte d’un fanatique devant le drapeau.
C’est dire que la dernière partie du film s’avère la plus intéressante car la plus surprenante ; dommage qu’il faille, pour y parvenir enfin, supporter deux heures assez molles.