Soupçons
Paul Sanchez est revenu ! a tout du film policier français, du moins en apparence. Nous avons une brigade de gendarmerie du Var, prise avec les soucis quotidien des habitants. Nous avons le...
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le 2 mars 2019
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S'il donne l'impression d'être un thriller français en bonne et due forme, Paul Sanchez est revenu ! est pourtant un étrange objet filmique qu'on a du mal à cerner.
Le titre, dans sa forme étrange, à d'emblée de quoi interpeler, et donne à l'évidence un indice.
Le ton donné dès le début produit des scènes dont on ne sait si elles sont profondément absurdes et à prendre à un degré élevé, ou si elles révèlent d'une maladresse totale de mise en scène.
Ce sentiment de gêne, qui met le spectateur dans une situation délicate, l'empêche de se positionner.
D'où, tout du long, un goût de film qui se cherche, cherche son ton, cherche sa trame, et nous balade sur une échelle large de tons.
Et c'est en cela peut-être que Paul Sanchez est revenu !, dans cette incapacité volontaire à ne pas se positionner, à semer le doute quant à ce que l'on regarde (tout comme l'enquête racontée se fonde sur le doute), fonctionne sur la longueur.
Le doute donc, contrairement à l'affirmation grossière de son titre ;
Le doute sur l'identité du personnage que l'on suit depuis le début (Laurent Lafitte, passant avec brio en un instant d'un homme n'inspirant que ridicule et pitié à un psychopathe véritablement terrifiant - la scansion brillante de l'acteur de théâtre se ressentant particulièrement dans certains monologues difficiles - trouve ici un rôle fort).
Le doute sur l'intelligence des personnages ; de l'héroïne, jouée par la physique Zita Hanrot (particulièrement impressionnante dans un rôle pas évident), foncièrement maladroite et stupide, qui s'avère petit à petit plus que ce qu'elle laisse paraître, au commandant de gendarmerie, qui à grand coups de citations littéraires et historiques sorties de nulle part alterne aussi entre puissance et bêtise.
Le doute sur ce que l'on veut nous faire croire ; la volonté du spectateur permanent que nous sommes tous de nous créer des récits alambiqués là où il n'y a probablement rien, de nous construire des histoires pour pimenter notre propre vie morne, de voir du mystère là où il n'y a probablement qu'une triste et limpide réalité (sociale, en l'occurrence, les plans d'ouverture l'explicitent intelligemment), de suivre ceux qui créent du récit (les médias) pour assouvir ce désir.
Le doute enfin sur le film lui-même dont on ne sait s'il est au final, après analyse, un essai décalé et brillant, un films aux multiples facettes, courageux et unique en son genre, ou un film bizarrement calibré, gênant parfois, mal équilibré, jonglant avec des genres pas toujours maitrisés.
On reconnaitra en tout cas à Patricia Mazuy son audace stylistique et ses partis pris artistiques (la bande-originale, bruitiste, parfois médiévale, souvent désagréable, mais pour le moins osée de John Cale, immense musicien américain, notamment membre du Velvet Underground, rien que ça) qui font de Paul Sanchez est revenu ! un Burn After Reading à la française, de toute évidence moins brillant.
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Créée
le 8 nov. 2020
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