Caméra à l'épaule accompagnant à merveille les soubresauts et les tourments intérieurs de l'obstinée et non moins troublée Paulina, Santiago Mitre signe à à peine 36 ans un second long-métrage vraiment réussi et bien accueilli par le monde du cinéma.
Histoire d'une folie jusqu'au-boutiste ou d'un sacrifice insensé, du délire d'une martyre ou d'une offrande totale d'une riche au peuple, difficile de cerner psychologiquement ce qui mène Paulina à faire ce qu'elle fait. Et c'est ce qui intrigue, nous tient en suspens, nous séduit dans le film, l'incapacité de pouvoir expliquer l'inexplicable. Et si les analepses ou les changements de point de vue nous éclairent parfois, ils ne peuvent cependant tout révéler. Dès le début, elle s'inscrira à rebours de son père, figure de la justice et de l'ordre moral, et décidera de faire ce qu'elle veut, sans se demander si cela est bien pour elle ou non. Volonté de se rebeller, de s'éloigner du père, de voler de ses propres ailes, de se frotter au réel, soit-il le plus âpre et sauvage possible? Un peu de tout ça, ou peut-être autre chose car encore une fois aucune véritable piste nous est donnée.
Enlevé par la prestation remarquable de Dolores Fonzi dans ce film rappelant tellement le très bon White Material de Claire Denis, Paulina en a certes dérouté certains ne se sentant guère à l'aise sur ce genre de terrain psychologique instable mais n'en demeure pas moins un film maîtrisé, avec une ambiance lourde, moite et étouffante dans laquelle marche seule celle qui, éprise de liberté, veut échapper à toute catégorisation et sortir des chemins déjà tracés.