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Poor Things (Pauvres créatures en vf) est le 7è long métrage réalisé seul par le grec. Il a été tourné quelques années après le réussi La Favorite et l'échec Mise à mort du cerf sacré. Lanthimos part ici d'une adaptation d'un roman de l'écrivain écossais Alasdair Gray. C'est une sorte de réécriture du mythe de Frankenstein, le Prométhée moderne.

Nous sommes à Londres et une femme dont on ne sait rien se jette du haut d'un pont. Elle meurt sur le coup, mais quelqu'un repêche son cadavre tout frais et le mène dans son cabinet pour l'utiliser dans ses expériences anatomiques. Il s'agit du chirurgien anatomiste Godwin Baxter (Willem Dafoe) professeur à l'université. Celui-ci de par son faciès fait de différents morceaux de peau rappelle immédiatement la créature de Victor Frankenstein. On apprend en effet que s'il n'a pas été fabriqué à partir de morceaux de cadavres, son père qui exerçait le même métier que lui et qui se livrait à des expériences similaires a expérimenté sur son propre fils. D'où un certain nombre de problèmes physiques engendrés dont l'un nécessitant un appareil spécial pour manger. Godwin Baxter examine le cadavre et se rend compte que la femme était enceinte. Il ouvre le ventre et décide de tenter quelque chose : greffer le cerveau du presque né dans le corps de la mère suicidée. C'est ainsi que nait Bella Baxter (Emma Stone) créature hybride étant un mélange d'une mère et de son enfant et aucune des deux à la fois. Avec l'apparence d'une femme adulte mais le cerveau d'un nouveau né, Bella devra apprendre, d'abord en noir et blanc, puis ensuite en couleurs, à s'approprier son corps et aussi tout ce qu'un bébé doit apprendre à faire : parler etc. Jusqu'à ce qu'elle devienne adolescente, découvre la masturbation et veuille voyager pour découvrir le monde. Elle partira avec Duncan Wedderburn (Mark Ruffalo) dans le rôle du machirulo à la Marlon Brando ou Hemingway et après un passage par Lisbonne découvrira d'autres villes comme Paris.

Yorgos Lanthimos nous livre ici un film avec un récit d'apprentissage, une Éducation sentimentale d'une jeune créature hybride dans un monde parfois steampunk et fait participer le spectateur aux différentes expériences de sa découverte de la vie (la sexualité, l'alcool, la colère, la haine, la cruauté, la pitié, la générosité, le mépris, le socialisme) et de la ville. En effet, il décide de tourner dans un monde parallèle et réinvente les grandes capitales européennes avec des décors azimutés et hallucinés mais qui vaudront surement à leurs créateurs quelques récompenses. Lanthimos s'amuse clairement ici avec ses décors et ses comédiens, mais aussi avec la caméra en utilisant zoom et dézoom, caméra convexe et peut-être concave et se wesandersonisant souvent (il reste cependant moins énervant que ce dernier) et se timburtonisant un peu aussi, il faut le reconnaitre, mais le sujet s'y prêtait. Un peu de Damien Chazelle pour le #toomuch et l’esbroufe (car il y en a), du Ruben Östlund pour la provocation (parfois gratuite) et du Terry Gilliam pour la folie de l'ensemble.

Le film est également une réflexion sur la femme. On voit très clairement que le réalisateur interroge son rapport à la femme depuis de nombreux films, et c'était frappant dans le précédent La Favorite. Ici, Bella va devenir femme en vivant ses propres expériences, mais aussi en étant confrontée à différents types d'hommes très différents qui veulent tous d'une manière ou d'une autre la contrôler ou la posséder certains acceptant néanmoins de la laisser libre comme c'est le cas du Dr Baxter ou de son assistant McCandless qui est aussi le fiancé de Bella. Il y a évidement Wedderburn le "macho mucho" personnage jouisseur et égoïste dont on a déjà parlé - il devient d'ailleurs fou à la fin et lorsque McCandless lui rend visite dans sa cellule, il rappelle le Renfield du Dracula de Coppola -, et aussi Alfie Blessington le mari de Victoria qui veut faire de Bella sa prisonnière, le militaire qui veut commander, conquérir et dominer. Au final seuls Max McCandless qu'elle fini par demander elle-même en mariage et Baxter à qui elle pardonne avant sa mort trouvent grâce aux yeux de Bella. McCandless représente le héros romantique classique tel que le Jonathan Harker du Dracula de Coppola ou le Ichabod Crane du Sleepy Hollow de Tim Burton.

Un film qui atteint des niveaux de recherche plastique qu'il n'avait jusqu'à présent atteint que dans La Favorite, une folie et un absurde proche de The Lobster et quelques interrogations proches de celles de Canine et de Alps. On attend donc le prochain avec curiosité.

Créée

le 29 févr. 2024

Critique lue 29 fois

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Hunkarbegendi

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