J'avais adoré quand je l'avais vu adolescent au cinéma, puis dédaigné en élargissant mon spectre. Revu cette semaine bien que je le connaisse presque par cœur, je vais essayer d’être objectif.
À la fin des années 90, Steven Spielberg puis Terrence Malick ont ressuscité le film de guerre portant sur la Seconde guerre mondiale avec Il faut sauver le soldat Ryan et La ligne rouge. Cette période est également marqué par le succès planétaire du Titanic de James Cameron, romance sur fond tragique et film emblématique de la fin du XXe siècle.
Le producteur Jerry Bruckheimer, ambassadeur assumé du "film pop-corn" va vouloir surfer sur ces vagues. Après le succès (surtout public) d'Armageddon, il reprend Michael Bay à la mise en scène, et la star montante Ben Affleck, cette fois dans le rôle titre.
Le film se découpe en trois parties à savoir, la création du triangle amoureux, l'attaque de Pearl Harbor et enfin le raid de Doolittle. Le scénario signé Randal Wallace, qui avait été nominé aux Oscars pour celui de Braveheart, tient bien la route et maintient un certain rythme. Il mélange habillement les faits et personnages historiques avec la fiction.
Le format long du film permet au réalisateur de prendre le temps de présenter les personnages, essentiellement les trois principaux protagonistes. Un aspect que je trouve intéressant est la dualité entre les personnages masculins. En effet, Ben Affleck incarne Rafe, le garçon qui a confiance en lui, fonceur, culotté et qui prend des initiatives ; tandis Josh Hartnett incarne Dany, le timide, plus réfléchi et cérébral et donc plus hésitant. Ces traits de caractères ressortent bien dans la façon dont ils vont aborder et faire connaissance avec Evelyn, interprétée par Kate Beckinsale. Cela ressort aussi dans leur façon d'envisager le conflit.
Le gros point noir c'est que, par moment, cela manque vraiment de subtilité. Il peut y avoir des moments d'émotion plutôt bien sentis mais il y a toujours une surcouche de guimauve qui fait tout retomber (pour ne pas dire plus). Cela vient alourdir le tout et c'est dommage. On passera sur les dialogues sentimentaux creux qui n'apportent rien. Dans certaines scènes cela démarre bien et cela finit en eau de boudin. Michael Bay manque vraiment de sobriété dans ces moments là, et également avec ses plans esthétiques mais un peu trop carte postale parfois. (On notera les séquences de natation dans le Pacifique qui rappellent La ligne rouge).
En revanche, la reconstitution de l'attaque de Pearl Harbor est vraiment une réussite. Que l'on aime ou pas le film c'est difficile de faire mieux. On y mélange habilement la réalité et la fiction, comme la séquence de Doris Miller/Cuba Gooding Jr, ou encore les deux pilotes américains qui ont réussi à décoller (cela a bien eu lieu). Le film Midway réalisé vingt ans après n'est pas aussi crédible avec ses effets numériques. Michael Bay le disait lui-même, que couler une maquette de l'Arizona ne se referait plus étant donné le coût (le numérique est plus rentable). Le raid de Doolittle est moins impressionnant mais vaut tout de même le détour.
C'est encore assez lourd lorsque l'on cherche à mettre en valeur le héros américain... (Les Anglais n'en reviennent pas) Les plans en contre-plongée au ralenti... Doolittle qui parle de s'écraser pour faire du dégât... Sous-entendu : il n'y a pas que les Japonnais qui en ont pour faire les Kamikazes... Il était possible de rendre hommage au courage de ces hommes, quelque fut leur camp sans pour autant être aussi lourdingue. (Pour Doris Miller c'est bien fait en revanche).
Les Japonnais bénéficient de quelques séquences assez courtes où on les voit en préparation avec les phrases célèbres de Yamamoto. C'est plutôt pas mal. Jon Voight est très bon en Roosevelt même si il est un peu trop mythifié.
La musique d'Hans Zimmer a un peu les mêmes défauts que le film. Elle est parfois jolie mais parfois elle grossit le trait et vient renforcer le coté lourd.
Mention spéciale avec la scène de retrouvailles avec le cercueil sorti de l'avion... Alors là c'est carrément la faute de goût et on n'est pas loin du carton rouge... Face à cela, Kate Beckinsale ne sait pas trop quoi faire. C'est franchement mauvais et dispensable.
C'est donc un film très inégal mais qui possède quand même des qualités. Il aurait peut-être mieux valu ne laisser que les scènes de batailles à Michael Bay. Pour les scènes de romance, n'est pas James Cameron qui veut. C'est vraiment dommage, que cela fasse parfois film à l'eau de rose car cela aurait pu être un très bon film. Après, il est possible qu'il y ait la patte du producteur là-dedans.
6.5/10