Un poil déçu par cette réalisation de Tsui Hark, pourtant réputée comme l'une de ses meilleures des années 80. Il faut dire déjà que le scénario se résume à vraiment peu de choses (à base de papiers secrets à récupérer), et on en fait rapidement le tour, même si effectivement ça brasse plus large en termes de thématiques. Heureusement que les situations sont assez variées pour retenir l'attention, alternant avec une certaine fluidité des genres aussi divers que le caper movie, la comédie, la romance (cependant moins soulignée que dans Shanghaï Blues), les arts-martiaux (un chouaïa), le drame, le tout enrobé dans un contexte politique troublé (ça se déroule juste après la révolution Chinoise de 1911) comme aime si bien le mettre en avant ce réalisateur polyvalent.
L'intérêt du film, hormis le cadre de l'opéra chinois vraiment sympa à suivre qui offre pour ma part la plupart des meilleures séquences (je pense surtout à celle où les deux meufs se retrouvent au devant de la scène et doivent se coordonner en improvisant, rappelant une autre scène dans Shanghaï Blues), repose essentiellement sur le melting pot créé par les personnages issus d'origines et de styles différents (on y retrouve l'espion héroïque, la chanteuse vénale et maladroite, l'androgyne qui tient ici un rôle particulièrement significatif...) et se retrouvant par hasard à partager la même mission. Le casting et les situations font en sorte qu'on y croit, et du coup on passe aussi facilement de séquences assez légères (dont une partie de cache-cache dans un lit vraiment fun à regarder) à d'autres plus féroces et parfois étonnants de violence.
Malgré un certain bordel sur le papier, la mise en scène de Tsui Hark est beaucoup plus calme et propre que d'habitude et donc on suit tout ça avec facilité, mais je regrette du coup qu'il n'y ait pas un peu plus de folie à l'écran (l'une des raisons pour lesquelles je préfère largement Shanghai Blues qui est tout aussi clair dans les enjeux et la forme, mais m'a plus accroché dans ses délires, et même en termes d'émotion il me paraît autrement plus puissant). Je rajoute au passage que le sous-texte du film vaut le coup d'oeil (comme souvent avec Tsui Hark) en nourrissant le background des personnages, car outre l'accent mis sur le combat pour la démocratie, Peking Opera Blues interroge aussi la place des femmes dans la société chinoise via le théâtre et la scène politique, tous deux dominés par des figures masculines plus ou moins tyranniques.
Bref, ce film reste tout de même dans le haut du panier du mec, mais je m'attendais à quelque chose d'un peu plus dingue pour être vraiment emporté, malgré ses jolis moments de grâce vécus par les personnages qui dégagent une certaine alchimie, surtout le trio féminin, attachant et partageant aussi des dilemmes intéressants par rapport aux hommes et la tradition.