Pentagon Papers (2018) retrace l'histoire vraie de la parution dans le Washington Post de documents secrets américains, en pleine guerre du Vietnam, prouvant que les gouvernements successifs ont menti sur raisons de la guerre.


Si Spielberg est archi connu pour ses films d'aventures (souvent mêlés à de la SF ou du fantastique), une autre de ses marottes est le film inspiré de faits réels, souvent en provenance de périodes charnières de l'histoire américaine, avec par exemple Lincoln (2012) ou Bridge of Spies (2015) pour ne citer que les plus récents. Pentagon Papers s'inscrit dans cette droite lignée et porte en lui les qualités classiques associées à Spielberg : scénario solide, technique impeccable, jeu d'acteur irréprochable par un casting 5 étoiles. Le film est intéressant, informatif, ainsi que subtilement engagé dans le contexte actuel (opposition Maison Blanche/médias et montée du féminisme).


Pourtant, je ne peux m’empêcher d’être quelque peu déçu. Pour moi, tout le film se cristallise autour du moment pivot où Katharine (Meryl Streep), décide, au téléphone, de publier les papiers. La scène fonctionne bien, la tension est à son comble, et j'ai été plutôt surpris du choix de Katharine. Pourtant, en y repensant, je me suis fait trois réflexions :



  1. Lors du débat entre l'éditeur et les juristes, pas mal d'arguments sont passés sous silence. Quid de la course avec le Times ? Quid de la possibilité de faire un travail de journaliste sérieux en l'espace de quelques heures ? Attendre le verdict du procès du Times est-il un compromis déontologique inacceptable ? Le débat revient à une opposition manichéenne entre les braves journalistes et les juristes couards. C'est un peu dommage.


  2. Je trouve qu'on ne comprend pas pourquoi Kay décide de publier, quand tout dans son personnage indique le contraire. Par la suite elle s'affirme, mais on a l'impression que c'est parce qu'elle a pris sa décision alors que ça devrait être l'inverse : parce qu'elle s'affirme (progressivement), elle arrive à prendre une décision difficile. Spielberg met un peu la charrue avant les boeufs.


  3. La suite tombe légèrement à plat. On pourrait penser que cette décision va entrainer des conséquences terribles pour le journal, mais en fait pas vraiment. Ils vont en justice, ils gagnent, fin. Rien de plus que ce à quoi on s'attendait. Un peu anticlimactique, en somme. Théoriquement, on s'attend dans un film à ce que les obstacles s’enchaînent en croissant toujours en intensité, mais ici ce n'est pas le cas : le pic est atteint trop tôt avec la décision de Kay. Certes, on ne peut pas inventer de nouveaux obstacles en se basant sur cette histoire vraie, mais le procès final aurait mérité d’être plus tendu.



Bref, Pentagon Papers est un bon Spielberg, même s'il souffre d'une troisième partie un poil molle. Pour ce qui est des films traitant de journalisme d'investigation, j'ai préféré Spotlight (2015) ainsi que
All the President's men (1976), qui est presque la suite directe de ce film.

Bastral
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le 14 sept. 2020

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