L'innocence violentée
Comme devant chaque adaptation littéraire, le ressenti devant Petit pays sera différent selon que l'on a lu ou non le roman d'origine. Le livre de Gaël Gaye, publié en 2016, valait tout autant que...
le 3 sept. 2020
19 j'aime
2
Je ne sais pas trop quoi penser de Petit Pays, autant j'aime l'idée de faire un film sur le génocide rwandais (et ses répercutions au Burundi) du point de vue d'un enfant, ce qui induit pas mal de hors champ, l'horreur est là, on la sent, mais on ne le voit que très peu jusqu'à qu'on soit obligé d'y prendre part soi-même... autant, ben le film est long et pas bien palpitant.
C'est un film très scolaire, ça manque cruellement d'idées de mise en scène et à ce que j'ai pu lire c'était très fidèle au bouquin (que je n'ai pas lu), me laissant penser qu'en fait Eric Barbier n'a juste pas d'idées et se contente d'être un artisan sans grand talent.
Sans grand talent car j'ai vraiment l'impression qu'il n'a pas su diriger ses acteurs, qu'il n'a pas sur s'emparer des moments forts du récit et passer sous silence ou écourter le reste. On se retrouve donc à l'arrivée on a un film bancal et un peu pénible (c'est peut-être parce que l'auteur du bouquin co-signe le scénario et qu'il n'a pas osé se trahir).
Bon déjà je suppose que si on ne connaît rien à la situation rwandaise dans les années 90 il va être difficile de suivre les différentes répercutions, représailles et de bien suivre les enjeux politiques et géopolitiques (par exemple on n'explique pas pourquoi il y a des réfugiés tutsis depuis les années 60 au Burundi, comme ça peut être le cas pour la mère du héros). Je suppose que c'est le problème de se placer à hauteur d'enfant, forcément on n'accède pas au même niveau de lecture des événements.
Mais malheureusement on n'accède pas non plus à l'émotion de ce que c'est que de vivre ces massacres du point de vue d'un gamin. Je trouve qu'on passe bien vite d'un jour à l'autre, qu'on ne s'attarde pas sur grand chose et que ça nuit vraiment au niveau de l'immersion. Par exemple l'oncle du héros se marie au Rwanda, mais on n'insiste pas vraiment sur le mariage et donc forcément lorsque l'on apprend le sort de sa famille rwandaise ça n'a quasiment aucun impact.
En fait plutôt que de vouloir faire rentrer des chroniques bourrées de petites anecdotes plus ou moins intéressantes, plus ou moins vraisemblables, ce qui peut fonctionner par écrit, il aurait fallu se concentrer sur une période plus resserrée, sur un ou deux événements marquants permettant qu'on aime les personnages et qu'on puisse comprendre le désarroi du gamin qui apprend leur décès.
Le film manque également d'un vrai regard d'enfant, horrifié, émerveillé, j'ai trouvé ça vraiment sage. Pour donner un exemple ses amis jouent un pistolet le héros refuse de participer, mais on ne sait jamais vraiment pourquoi lui ça ne lui plaît pas, on n'épouse même pas réellement son point de vue. Nous spectateurs on sait qu'il ne faut pas jouer avec une arme, mais lui, comment il le sait ? c'est un gamin.
Quant aux moments de paix, à part une séquence que je trouve convenue et peu origine avec une balançoire il n'y en a pas beaucoup, or au niveau de la dramaturgie ça aide pour montrer ce que le héros perd, ça aide à créer un attachement envers les amis du héros. Là, clairement je m'en fous d'eux.
Et en fait, dans le genre : film sur les horreurs de la guerre avec un père qui tente d'en protéger ses gamins, je trouve La Guerre des mondes de Spielberg bien plus abouti. Alors oui, c'est pas basé sur de faits réels, mais on aurait pu imaginer un traitement similaire avec le point de vue d'un adulte...
Mais là le film hésite trop sur ce qu'il veut faire et finalement ne dit pas grand chose et n'émeut guère. C'est gentillet, avec une séquence finale qui se veut horrible, mais qui arrive juste à être pénible et laide à vouloir jouer la frénésie, là où le silence aurait pu la rendre glaçante.
Et un peu tout est comme ça, trop rapide, perdant son rythme en voulant aller trop vite pour tout montrer. Sauf qu'on n'a pas besoin de tout montrer et de revenir sur chaque détail du roman.
Créée
le 11 nov. 2020
Critique lue 2.6K fois
15 j'aime
1 commentaire
D'autres avis sur Petit pays
Comme devant chaque adaptation littéraire, le ressenti devant Petit pays sera différent selon que l'on a lu ou non le roman d'origine. Le livre de Gaël Gaye, publié en 2016, valait tout autant que...
le 3 sept. 2020
19 j'aime
2
Adaptation du prix Goncourt des lycéens 2016 et succès littéraire instantané, Petit pays est un roman flirtant avec l'autofiction où l'auteur, Gaël Faye, raconte une enfance au Burundi déchirée par...
le 27 août 2020
16 j'aime
1
Je ne sais pas trop quoi penser de Petit Pays, autant j'aime l'idée de faire un film sur le génocide rwandais (et ses répercutions au Burundi) du point de vue d'un enfant, ce qui induit pas mal de...
Par
le 11 nov. 2020
15 j'aime
1
Du même critique
Je ne comprends pas Disney... Quel est le projet ? Je veux dire, ils commencent avec un épisode VII dénué de tout intérêt, où on a enlevé toute la politique (parce qu'il ne faudrait surtout pas que...
Par
le 21 déc. 2019
494 j'aime
48
Souvenez-vous Bruce nous avait cassé les couilles dans sa vidéo de présentation de son "livre", blabla si tu télécharges, comment je vis ? et autre pleurnicheries visant à te faire acheter son...
Par
le 29 nov. 2015
305 j'aime
146
Voici l'autre grand livre « féministe » de la rentrée avec Moi les hommes je les déteste et tous les deux sont très mauvais. Celui la n'a même pas l'avantage d'être court, ça fait plus de 200 pages...
Par
le 4 oct. 2020
246 j'aime
61