Il est des films que leur interprète principal voudrait oublier. The Wraith, connu dans notre contrée par le patronyme Phantom, est sans aucun doute l'un des films dont Charlie Sheen se vante le moins. Sorti la même année que Platoon d'Oliver Stone, le film de Mike Marvin fait plutôt tâche dans la filmographie de ce "fils de" à la carrière prometteuse. Une erreur de parcours qui heureusement pour l'intéressé aura finalement peu de conséquence grâce au succès international des troisième et quatrième longs métrages de Stone. Mais au-delà de cette satisfaction déviante de citer les ratés d'un ancien jeune premier, il est également de bon ton de se rappeler au bon souvenir d'une demoiselle brune, connue des initiés pour sa maîtrise dans le nouage de queue de cerise. Car avant de devenir un objet de fantasme pour le jeune mâle occidental au début de la décennie 1990, dans la série culte de David Lynch et Mark Frost, Twin Peaks, Sherilynn Fenn tourna entre autres dans ce sinistre essai de vigilantisme routier postmortem. De là à écrire que seule sa présence justifie le visionnage ce Phantom...
Désert de l'Arizona. Trois boules lumineuses déchirent la nuit de leur traînée bleue. De leur collision apparaît une voiture futuriste et son pilote casqué tout de noir vêtu. A quelques lieux de là, Packard Walsh (Nick Cassavetes) et son gang sèment la terreur sur les routes du comté au grand dam du shérif Loomis (Randy Quaid). Leur passe-temps favori est de provoquer en duel les pauvres quidams qui croiseraient par mégarde ces adolescents rebelles. Mais les plans de Walsh vont se compliquer avec l'arrivée simultanée du jeune inconnu Jake Kesey (Charlie Sheen) et du mystérieux pilote au volant de son Turbo Interceptor. Loin d'être insensible au charme Keri Johnson (Sherilyn Fenn), la nouvelle fiancée de Walsh, Kesey porte d'étranges cicatrices évoquant l'ancien petit ami de Keri, mort assassiné il y a peu...
Croisement bancal et grossier entre High Plains Drifter (L'homme des hautes plaines) de Clint Eastwood pour le fantôme vengeur, Mad Max pour les courses de voiture et enfin Class 84 pour la menace (cyber-)punk, ce deuxième film de Mike Marvin avait d'emblée tout du produit périssable made in 80's. Phantom accumule ainsi autant les poncifs que les genres possibles (action, fantastique, comédie, romance et thriller). Ne sachant véritablement dans quelle direction où aller, Marvin n'est guère plus inspiré quant à l'image de son métrage. Il hésite ainsi entre un esthétisme télévisuel du meilleur goût et le lyrisme pompier publicitaire qui faisait florès dans les années 1980. Et le scénario, écrit aussi par ses soins, suit la même trajectoire : intrigue prévisible, romance à l'eau de rose, personnages manichéens, dialogues ridicules, etc.
Seuls les amateurs d'espace désertique et de grosses cylindrés sous le soleil brûlant d'Arizona pourraient alors trouver leur compte ? Pas sûr finalement. La vision des supposées spectaculaires poursuites en voiture n'est pas véritablement probantes. Ajoutons une bande-originale que seuls les historiens de la musique de cette décennie apprécieront, soit le meilleur du pire du rock et hard FM (Ozzy Osbourne, Billy Idol, Robert Palmer, Bonnie Tyler et autres Motley Crue), The Wraith en plus de faire mal aux yeux, transpercera les tympans des derniers imprudents venus pour son casting « alléchant ».
Or la distribution de Phantom est à l'instar du reste, et en parfaite adéquation avec la qualité globale du film : au ras du bitume. Entre le fils transparent de Martin Sheen et celui de John Cassavetes qui en fait des tonnes en surjouant le bad guy, Clint Howard (frère de Ron) tire au mieux son épingle du jeu dans le rôle du bricoleur génialement loser (à la coupe de cheveux héritée de Jack Nance dans Eraserhead). Et la belle Sherilyn Fenn ? Son rôle de faire-valoir et de petite-amie stéréotypée, portant le deuil de son bien-aimé sacrifié sur l'autel de la convoitise, lui laisse peu de marge. Aux fétichistes trentenaires et autres quadras de se repaître de son maillot de bain deux pièces, et d'un sein rapidement dévoilé durant la scène torridement tiédasse entre miss Fenn et sieur Estevez.
The Wraith ou l'exemple du teen-movie 80's délicieusement moisi.
http://www.therockyhorrorcriticshow.com/2013/09/the-wraith-phantom-mike-marvin-1986.html