Moralité : n'allez pas au cinéma.

Enfin vu l’un des films qui squatte le top des listes contenant dans leur titre lacrymal, émotion ou encore tolérance. Une appartenance légitime au genre je raconte une histoire vraie avec des gros sabots, subis mon courroux, tu vas pigner à la fin. Et forcément, quand les images d’archives des dernières minutes accompagnent l’adieu d'un battant sans peur et sans reproche, ange attentionné victime de l’un des plus gros fléaux de la fin du 20ème siècle, la tristesse envahit la bobine, comment pourrait-il en être autrement.


Mais cette tristesse est-elle génératrice d’émotion ? La réponse est plus délicate à fournir. Est-ce que les rouleaux compresseurs narratifs qui y mènent, les prestations maniérées de tous les acteurs sur un chemin formaté par la leçon de morale que toutes ces composantes construisent, ne sont pas surdimensionnés en vu du message qu’ils sont censés servir ? C’est efficace certes, mais l’est-ce suffisamment pour que l’on ait envie d’y revenir, pour que l’on y repense quelques jours, quelques mois, après ? Rien n’est moins sur.


Ce sujet nécessaire n’est-il pas rendu simpliste par l’accumulation des clichés qui le définissent. Tous ces personnages unidimensionnels, y compris celui de Hanks, n’ôtent-ils pas à la démonstration de la dernière heure la puissance de sa banalité ? A savoir que le SIDA fait peur parce qu’il tue et que l’homosexualité était, et est toujours, source de clivages.


Pour le reste, pas grand-chose à dire, et c’est de toute façon la limite de ce genre de film d’où le débat, finalement, est absent. Mise en scène efficace, dont rien ne dépasse, comme c’est le cas des prestations cliniques des différents comédiens à l’œuvre : Hanks joue très bien le malade, son visage poupon n’aurait pu mieux servir la passion innocente qui animait le bonhomme auquel il prête ses traits et Denzel fait du Denzel, donc tout va bien.


Philadelphia fut un film nécessaire. Et il était sans doute impensable de le concevoir autrement qu’en simplifiant à l’extrême son propos. Reste que quand on y cherche un peu plus que le côté polémique de son sujet, on se heurte à un vide manifeste assez pénible.

oso
5
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste L'ours, Homo Video, en 2017

Créée

le 30 avr. 2017

Critique lue 2.1K fois

17 j'aime

5 commentaires

oso

Écrit par

Critique lue 2.1K fois

17
5

D'autres avis sur Philadelphia

Philadelphia
OkaLiptus
10

Mélancolie, abattement et espoir sur les rues de Philadelphie

Philadelphia est d’abord un plaisir pour les yeux. Agencement naturel et divin dans un écrin de luxe : l’étalonnage vert orange et bleu, la qualité des jeux de lumière ainsi que le grain...

le 12 févr. 2019

47 j'aime

22

Philadelphia
Nikki
9

Sickman.

« Philadelphia » fait parti de ce genre de film qui faut avoir regardé au moins une fois dans sa vie. Véritable plaidoyer pour la tolérance envers les victimes de maladies diverses et contre la...

le 1 déc. 2013

20 j'aime

12

Philadelphia
oso
5

Moralité : n'allez pas au cinéma.

Enfin vu l’un des films qui squatte le top des listes contenant dans leur titre lacrymal, émotion ou encore tolérance. Une appartenance légitime au genre je raconte une histoire vraie avec des gros...

Par

le 30 avr. 2017

17 j'aime

5

Du même critique

La Mule
oso
5

Le prix du temps

J’avais pourtant envie de la caresser dans le sens du poil cette mule prometteuse, dernier destrier en date du blondinet virtuose de la gâchette qui a su, au fil de sa carrière, prouver qu’il était...

Par

le 26 janv. 2019

83 j'aime

4

Under the Skin
oso
5

RENDEZ-MOI NATASHA !

Tour à tour hypnotique et laborieux, Under the skin est un film qui exige de son spectateur un abandon total, un laisser-aller à l’expérience qui implique de ne pas perdre son temps à chercher...

Par

le 7 déc. 2014

74 j'aime

17

Dersou Ouzala
oso
9

Un coeur de tigre pour une âme vagabonde

Exploiter l’adversité que réserve dame nature aux intrépides aventuriers pensant amadouer le sol de contrées qui leur sont inhospitalières, pour construire l’attachement réciproque qui se construit...

Par

le 14 déc. 2014

58 j'aime

8