Pour son premier long-métrage, Luciano Ercoli réalise en 1970 un giallo beaucoup plus subtil qu'il n'y parait ! Enfin, "plus subtil" n'est pas vraiment le mot, on va dire que l'on s'éloigne un peu des codes du genre pour se focaliser sur le côté enquête mais surtout psychologique, plaçant alors le film presque plus du côté du thriller italien tout court que du giallo.
Mais on retrouve tout de même quelques codes phares du genre comme l'aspect enquête évidemment, d'ailleurs mené (comme souvent) par un protagoniste dont la police et/ou l'entourage doute énormément, les twists en pagaille (même si on aura vu beaucoup plus tiré par les cheveux) et puis, bien-sûr, des femmes nues et ici notamment une en particulier, d'où le titre du film.
Parce-que oui, il s'agit ici d'une bourgeoise dont un homme lui informe que son mari a assassiné quelqu'un. Et, afin de garder le secret, il lui ordonne de poser nue puis de coucher avec lui au risque de divulguer les photos, en particulier au mari.
On est devant un film quelque-part opportuniste car il use des codes racoleurs du genre mais quel giallo ne l'est pas ? De plus, encore une fois, le scénario laisse tomber les meurtres, le sang etc. (ce qui peut en déplaire à plus d'un et ce que je comprends) pour se concentrer sur l'aspect psychologique des personnages.
Effectivement, le personnage principal est présenté comme une femme objet (alors il faut aussi remettre le film dans son contexte des années 70 mais c'est trop appuyé pour que ce soit juste anodin), complètement influençable et manipulable par son entourage. C'est en réalité une bourgeoise qui sort malgré elle de sa zone de confort et qui se fait maltraiter par les hommes qui l'entourent (elle souffre autant de l'absence de son mari - qui la prend en plus bien souvent pour une débile et qui la rassure en lui disant qu'il n'est pas jaloux suite à son viol - que du chantage de ce qui devient malgré elle son amant). Il y a en effet toute une dimension sexiste et misogyne que le film explore en objectifiant la femme donc mais en la transformant également en une marchandise et une monnaie d'échange.
Puis, en dehors de ces thèmes intéressants, nous avons un scénario très bien écrit quoique prévisible mais en revanche très bien rythmé ! Et puis, c'est sans oublier l'excellente B.O. d'Ennio Morricone qui confère au film tout son charme.
"Photo interdite d'une bourgeoise" est un giallo qui s’éloigne un peu de ce que le genre a l'habitude de nous proposer, ce qui est une très bonne chose !