Vous savez quoi ?
J'ai déjà 37 briques. Depuis décembre...
Et il m'aura fallu 37 briques, la fibre optique et des sites de streaming à portée de clic, une inscription sur SC et un ressouvenir soudain, pour me taper enfin la version ciné de The Wall.
Il m'aura fallu 37 briques pour donner un début et une fin au clip d'Another Brick in the Wall et ses armées de marteaux qui passaient en rangs bien ordonnés sur les chaînes hertziennes des années 80.
Il m'aura fallu 37 briques pour mieux comprendre pourquoi le double-album éponyme - qui m'avait déçu lorsque je n'étais qu'adolescent - avait autant de grands fans. Il fallait avoir vu le film. Quoique même à 37 briques je camperai sur cette position malgré les "likes" qu'elle me coûtera : un simple-album aurait été merveilleusement suffisant.
Il m'aura fallu 37 briques pour regarder des enfants sortir de l'école comme de plus grands s'entretuent en treillis.
Il m'aura fallu 37 briques pour apprécier la beauté d'un terrain de rugby timidement ensoleillé.
Il m'aura fallu 37 briques pour m'émouvoir des traits d'une colombe déchiquetée par un aigle noir, et de plantes carnivores turgescentes forniquer entre elles.
Il m'aura fallu 37 briques pour effleurer l'histoire d'une rock-star - au père mort à la guerre et à la mère étouffante - partir en sucette dans l'isolement d'un poste de télévision puisque les jeunes femmes, cyniques, ne semblent pas plus capables que lui d'aimer nos solitudes. Remplies de besoins possessifs. Et lui de l'envie de s'envoler, sans avoir nulle part où aller.
Il m'aura fallu 37 briques pour ressentir aussi puissamment le gâchis d'éducations de formatage et d'étranglement de la créativité. Le châtiment des poètes. Et l'émergence totalitaire.
Il m'aura fallu 37 briques pour qu'un clip géant, aux animations époustouflantes, devienne pour un temps mon expérience cinématographique la plus jouissive, la plus émouvante.
Parce qu'il m'aura fallu 37 briques pour qu'en à peine plus d'1h30 défile devant mes yeux ébahis tout un pan de ma jeunesse.
Et enfin, il m'aura fallu 37 briques pour que les noms d'Alan Parker et de Pink Floyd soient définitivement associés à un chef-d'oeuvre de la pop-culture. A un monumental pain de parpaings à défoncer. Parpaings d'un mur du temps qui passe.