Qu'on aime ou pas le Aja, il est clair qu'il aura marqué l'esprit de bon nombre de spectateurs, jusqu'à entraîner une vague de films tentant de copier son ambiance décomplexée, sans toutefois y arriver (on pense à Shark 3D, ainsi qu'à beaucoup de téléfilms...)
Une suite paraissait donc inévitable.
Malgré les tensions entre les producteurs et Aja, ce dernier était partant pour la réaliser. Elle aurait pris place durant la Fool Moon Party en Thailande (après le Spring Break, le but d'Aja étant donc d'inviter les piranhas lors de grands rassemblements étudiants).
Cependant, si l'original a correctement fonctionné au box office, les résultats n'en sont pas pour autant impressionnants. Une suite à plus petite échelle est donc envisagée. Aja est vite écarté, au profit d'un habitué de la boîte de production, en la personne de John Gulager.
Surtout connu pour avoir réalisé la trilogie Feast (dont je n'ai vu que le premier épisode, sympathique mais très brouillon), Gulager a réussi à maintenir un degré de violence et de nudité important (des éléments essentiels qui ont fait le succès du premier) et à tourner le film en 3D, sans passer par la case conversion.
Cependant, les retards importants (le film aurait du initialement sortir l'été dernier) de production, et les premiers visuels et bandes annonces ne présageaient rien de bon, sinon une suite au rabais (amplifiée par le lieu clé de l'intrigue : un petit parc aquatique).
Finalement, le film sort sur les écrans avec quasiment un an de retard, et uniquement en Angleterre et en Irlande. Pour le reste, il sera disponible en VOD aux Etats-Unis (et donc très prochainement en Albanie, les habitués comprendront) en juin.
En France, on ne sait toujours pas ce qu'il en sera, même s'il semble évident que le film est condamné à une sortie direct-to-video.
Et donc le film en lui-même, que vaut-il?
Tout d'abord, je dois dire que j'ai bien aimé le film d'Aja. Il m'a offert exactement ce que je voulais voir : de la violence décomplexée, de la nudité gratuite, et une ambiance estivale très agréable. Certes, le film souffrait de nombreux défauts (rythme défaillant, effets spéciaux relativement mauvais...), mais il était réalisé avec amour, et soutenu par un excellent casting.
En me déplaçant au cinéma pour voir cette suite, je ne m'attendais donc absolument pas à un chef d'œuvre. J'espérais juste passer un bon moment.
Et à ma grande surprise, le contrat est largement rempli.
Piranha 3DD se prend encore beaucoup moins au sérieux que son ainé. Et on s'en rend compte dès les premières minutes, ou les piranhas sont libérés par le cadavre d'une vache qui pète (véridique!)
Le film est réellement amusant, et accumule les scènes et les idées énormes (avec une belle variante du célèbre masticage de pénis du film d'Aja), sans aucune morale (le sort réservé aux enfants lors du final est absolument hilarant).
Aussi, le rythme est beaucoup plus soutenu, et on ne s'ennuie jamais.
L'action n'est pas restreinte, comme on pouvait le penser, au seul parc aquatique (qui servira surtout pour le climax). Le film se déroule sur plusieurs lieux différents (marais, hôpital, route désertique) et les piranhas attaqueront avec une belle énergie.
Le casting a été quasi-entièrement revu, et seuls Paul Scheer, Christopher Lloyd et Ving Rhames réapparaitront. Ces 2 derniers sont d'ailleurs excellents (voir Lloyd sur un grand écran est toujours un bonheur), et prennent beaucoup de plaisir à jouer leur rôle (celui de Rhames tient plus du caméo, d'ailleurs non-crédité au générique, mais il fait preuve d'un sens de la dérision qu'on ne lui connaissait guère).
Le rôle principal est ici tenu par la très jolie Danielle Panabaker (The Ward Vendredi 13), qui s'en sort plutôt bien. Elle est épaulée par l'humoriste David Koechner, qui en fait un peu trop.
On retrouve également ce bon vieux Gary Busey, ainsi que David Hasselhoff dans son propre rôle. Ce dernier apporte au film énormément d'humour et de dérision, jouant avec malice de son côté has-been (notamment en citant Anaconda 3), et représente ainsi un excellent choix de casting. C'est simple, à chaque fois qu'il apparaît à l'écran, c'est du pur plaisir. LA bonne idée du film.
La réalisation de Gulager est très fonctionnelle, et malgré une belle énergie lors des scènes d'actions (l'attaque du ponton, l'héroïne coincée sous l'eau lors du final...), elle se montre assez décevante, surtout comparée avec celle d'Aja.
Cependant, le film est très joliment photographié (jolis couchers de soleil et bel usage de couleurs dans certaines scènes).
Les effets spéciaux ont été améliorés, les CGI s'intègrent beaucoup mieux à l'image (notamment en ce qui concerne les interactions des piranhas avec l'eau), et l'usage de marionnettes pour les plans rapprochés représente un très bon choix.
Le film est gore, certes moins démonstratif que le précédent , mais ne boudons pas notre plaisir. Par contre, là ou Aja arrivait très bien à retranscrire le côté sadique des attaques des piranhas (se faire mordiller de tous les côtés de manière irrémédiable), Gulager préfère la finalité : les attaques seront courtes, et on s'attardera plus sur l'état des corps après avoir été attaqués, que sur l'action en elle-même.
Par contre, le carnage final tant attendu est décevant. Un nombre raisonnable de morts certes, mais l'action reste surtout concentrée en surface, et les piranhas sont souvent absents de l'image. Ce qui donne un côté assez fauché à l'ensemble.
Heureusement que certaines idées délirantes viennent le relever (la jambe de Ving Rhames, la mort des enfants, David Hasselhoff qui prend part à l'action).
On sent tout de même bien que le budget à été revu à la baisse, car il y a un manque d'ampleur véritable (lorsque Ving Rhames tire sur les piranhas, on ne voit que des "splash" à la surface, les figurants sont peu nombreux, et l'explosion finale abuse de gros plans pour palier son manque de spectaculaire).
Malgré tout, la résolution de l'intrigue, absolument pas sérieuse et qui préfère maintenir le délire (le ton est assumé jusqu'au bout) est assez satisfaisante, : ralentis, musique type opéra, morts gratuites et outrancières...
La musique est relativement passe-partout, et on ne retrouve pas le thème principal de Michel Wandmacher sur l'original. Ceci-dit, elle n'en est pas non plus déshonorante.
Enfin, en ce qui concerne la 3D, elle est relativement bien fichue, même si pas vraiment essentielle (comme toujours). Cependant, de nombreux plans font jaillir des objets, des poitrines (hommage au titre), ou des piranhas hors de l'écran. C'est très gadget, mais toujours sympathique.
Bien qu'inférieure, Piranha 3DD n'en reste pas moins une suite honorable, jouant sur la continuité de ton (à ce titre, la pirouette finale, qui fait écho à celle du premier, est cette fois vraiment bien vue) et allant beaucoup plus loin dans le délire (encore une fois, David Hasselhoff est monstrueux). D'ailleurs, le générique de fin dure une bonne dizaine de minutes, tout simplement parce que le bêtisier y est inclus (et pour quelqu'un qui a pris plaisir à suivre le film, c'est vraiment appréciable).
En résumé, un vrai plaisir coupable, marrant, cheap, mais toujours fun, que je ne regrette aucunement d'avoir découvert sur grand écran (malheureusement dans une salle complètement vide).
Ce n'est absolument pas du grand cinéma, mais c'est tout à fait recommandable pour qui veut passer un bon moment.
