Retour vers le passé.

En 2018, un homme se met en tête de revoir tout ce qu'il a filmé depuis 25 ans, soit l'âge où son père lui a donné un caméscope, et depuis lors, il a toujours filmé les évènements de sa vie, soit dès ses 12-13 ans.

Play est un film dont j'ai malheureusement raté la sortie en salles, car son bide fait qu'il n'est pas resté longtemps à l'affiche. Mais dès le départ, en voyant la bande-annonce, à savoir filmer de 1993 à 2018, je savais et sentais que c'était fait pour moi. Et j'ose lâcher le mot ; c'est un film magnifique, qui est de ceux, très rares, qui ont failli me faire pleurer, car d'une certaine façon, je me suis reconnu.
On sent que le réalisateur, Anthony Marciano, est un homme qui a eu envie de retourner sur son passé, tout comme Max Boublil, car le personnage se met en tête de devenir comédien. Avec un sens du détail hallucinant, on suit l'évolution de ce type, qui est au fond un adulescent, qui aime faire le con avec ses potes, avec sa meilleure copine, qui profite de la vie, jusqu'à ce que le temps des regrets se profile. En parlant de détails, je peux parler de l'image, au départ comme un caméscope des années 1990, avec son effet VHS, ou ce petit craquement que la caméra faisait quand on la bougeait. Mais ça évolue durant les décennies, avec la caméra numérique, et enfin un Iphone, où le format de l'image change, mais également la netteté ou le grain. Chapeau également pour avoir trouvé des comédiens aussi formidables, où tous ressemblent à ce qu'ils seront en tant qu'adultes, aussi bien Alice Isaaz que Max Boublil ou Malik Zidi. D'ailleurs, la première est ce point juvénile dans son apparence qu'elle va incarner son personnage dès ses 19 ans, et par les lunettes ou la coiffure, elle est crédible. On retrouve aussi Noémie Lvovsky et Alain Chabat qui incarnent les parents de Max Boublil, et je me demande si leur apparence à l'écran, où ils sont bien plus jeunes qu'on les connait, ne serait pas l'utilisation du rajeunissement numérique, comme on voit dans tant de films américains ?
Mais Play est également l'occasion de se retrouver. Sans avoir vécu les choses de la même façon, j'ai connu aussi le vigile qui ne nous laisse pas entrer en boite quand d'autres peuvent rentrer parce qu'ils sont avec des filles, chanter sur Hélène et les garçons, la première soirée où j'ai eu mon permis (j'étais allé au cinéma voir Scream 3, sans accident), la victoire à la Coupe du Monde 1998, le passage en l'an 2000 avec You're my high, c'était la période Fun Radio, la fille dont on n'osait pas avouer ses sentiments, celle qui ne nous correspond pas, les jalousies, les remords, les désillusions, les parents qui se séparent... En somme, j'ai eu l'impression de revoir moi aussi 25 ans de ma vie, et que quand j'entends que rien n'est encore fini à près de 40 ans, et bien ça me touche, car je me sens visé.

L'autre grand mérite du film est son choix dans la bande originale, qui a coûté un sacré paquet en droits d'auteurs, car là aussi, c'est un flashback auditif avec, outre les titres cités, Wonderwall d'Oasis, Lucky star de Superfunk et Blink 182. Mais là aussi, ça permet de situer l'époque dans laquelle on vit.
Je me demande si le film peut autant marcher sur les gens qui ne sont pas nés entre la fin des années 1970 et le début des années 1980, car il me semble tout de même particulièrement référencé ; est-ce là l'origine du bide en salles ? Peu importe, car Play restera comme un marqueur de son temps, et rien que ça, c'est un film formidable.